Damascus dossier

Comment le régime d’Assad a dissimulé le sort de 160 000 détenus dans son appareil sécuritaire

Une enquête internationale d’investigation a révélé de nouveaux détails sur un système de mise à mort systématique mis en place par le régime déchu dans ses prisons, sur la base de plus de 134 000 documents secrets des services de renseignement.

Les documents et les photos, prises par des photographes militaires, montrent des corps de détenus numérotés et classés ; certains sont nus et portent des traces de famine et de torture. Les documents ont également mis en évidence une coordination entre les services de sécurité syriens et des alliés tels que la Russie et l’Iran, ainsi que des liens financiers avec des sociétés de sécurité loyales au régime, ayant reçu plus de 11 millions de dollars d’agences affiliées aux Nations unies.

L’enquête, connue sous le nom de « Dossier de Damas », s’appuie sur un ensemble de documents secrets des services de renseignement syriens obtenus par la chaîne allemande NDR et partagés avec le Consortium International des Journalistes d’Investigation (ICIJ). Les investigations ont révélé le fonctionnement des appareils sécuritaires d’Assad et leurs relations avec des gouvernements étrangers et des organisations internationales.

L’ICIJ, NDR et 24 médias partenaires issus de 20 pays ont passé plus de huit mois à organiser et analyser les documents, consulter des experts et interviewer des familles syriennes cherchant toujours leurs proches disparus sous le régime Assad.

Les fuites comprennent plus de 134 000 fichiers, pour la plupart en arabe, représentant environ 243 gigaoctets de données. Ces documents couvrent plus de trois décennies, du milieu des années 1990 jusqu’à décembre 2024. Ils proviennent du renseignement de l’armée de l’air, de la Direction générale du renseignement et d’autres organes de sécurité, qui ont fait l’objet de lourdes sanctions américaines et européennes pour leurs pratiques brutales, incluant torture et violences sexuelles.

Les documents contiennent des notes internes, rapports et communications dévoilant les opérations quotidiennes du réseau de surveillance et d’arrestation du régime déchu d’Assad, ainsi que sa coordination avec des alliés étrangers comme la Russie et l’Iran, et ses interactions avec des agences de l’ONU opérant en Syrie. Les données sensibles incluent les noms d’anciens officiers des services de renseignement syriens.

En outre, NDR a obtenu et partagé avec l’ICIJ et ses partenaires plus de 70 000 fichiers et images, dont plus de 33 000 photos haute définition documentant la mort de plus de 10 200 détenus syriens, pour la plupart entre 2015 et 2024.

La machine sécuritaire de dissimulation du régime déchu

Les documents montrent une politique étatique systématique d’arrestations massives et d’exécutions. Sous Assad, le régime a arrêté et fait disparaître de force au moins 160 000 Syriens lors de la répression de la révolution syrienne.

Après la chute d’Assad en décembre 2024, les familles ont fouillé prisons et morgues à la recherche de traces de leurs proches disparus, examinant des inscriptions sur les murs de cellules, fouillant des fosses communes et comparant des restes de vêtements — souvent sans réponse.

Le « Dossier de Damas » révèle comment les responsables du régime déchu ont réduit la valeur de la vie humaine à de simples documents. La plupart des certificats de décès signés par des médecins des hôpitaux militaires de Harasta et de Tichrine — où les victimes de torture étaient transférées — mentionnent comme cause de mort un « arrêt cardio-respiratoire » ou un « arrêt cardiaque ».

Chaque dossier représente une famille laissée dans l’attente, une vie effacée, et un système conçu pour masquer des meurtres de masse derrière une façade bureaucratique. Grâce à cette base de données, les équipes d’enquête ont fourni des éléments permettant à des familles de connaître le sort de leurs proches.

Les photos divulguées constituent le plus grand ensemble d’images de détenus du régime syrien jamais obtenu par des journalistes. Elles ont été prises par des photographes militaires et montrent des détenus morts dans les hôpitaux et prisons du régime, leurs corps numérotés et enregistrés selon une procédure bureaucratique méticuleuse. Les photos incluent notamment celles du militant bien connu Mazen al-Hamadeh.

Des images que les Syriens n’avaient jamais vues

Une équipe de journalistes de l’ICIJ, de NDR et du quotidien allemand Süddeutsche Zeitung a mené une analyse approfondie d’un échantillon de centaines de photos. L’analyse montre que la plupart des victimes présentaient des signes de famine et de violences physiques, et que beaucoup étaient nues. Les images révèlent que les corps, après la mort, étaient transportés, photographiés et documentés.

Le numéro du détenu était souvent placé sur une carte blanche posée sur le corps, inscrit au marqueur sur un bras, une jambe, le torse ou le front, ou ajouté numériquement sur la photo. Le photographe militaire, portant un couvre-chaussures ou des bottes en caoutchouc, prenait plusieurs clichés du corps sous différents angles, puis les archivait dans des dossiers numériques parfaitement organisés.

Au cours de l’enquête, l’équipe a appris que ces photos avaient été transmises séparément aux autorités allemandes, qui mènent les poursuites contre d’anciens membres du régime Assad, et qu’elles sont actuellement conservées par la « Syrian Center for Legal Studies and Research », une ONG allemande documentant les violations des droits humains.

L’ICIJ et NDR ont extrait les noms des victimes et NDR a transmis les informations à trois organismes pour aider les familles à identifier leurs proches : l’Institution indépendante pour les personnes disparues en Syrie (ONU), le Réseau syrien des droits de l’homme et l’initiative « Taafi » de soutien aux survivants de la détention et de la torture.

Comment le régime déchu a profité des fonds onusiens

Les documents montrent également comment le régime Assad a tiré parti de ses relations avec les agences onusiennes chargées de fournir une aide aux Syriens. Pendant la guerre, ces agences ont versé au moins 11 millions de dollars à une société de sécurité syrienne privée chargée de protéger les bureaux de l’ONU — une société qui s’avère aujourd’hui appartenir aux services de renseignement du régime déchu et être contrôlée par eux.

En dépit d’avertissements lancés en 2022 par des organisations de défense des droits humains sur les liens de cette société avec le régime, les contrats ont été prolongés de deux années supplémentaires, injectant des millions de dollars dans les mêmes appareils accusés de torturer et tuer des Syriens.

L’une des notes obtenues par le « Dossier de Damas », signée par l’ancien ministre des Affaires étrangères Fayçal Mekdad, montre que le régime s’attendait à ce que les employés des sociétés de sécurité syriennes surveillent le personnel de l’ONU au profit du renseignement syrien.

Le « Dossier de Damas » dévoile la structure détaillée des chambres de torture du régime Assad et apporte de nouvelles preuves montrant que les institutions sécuritaires d’Assad fonctionnaient comme une machine unifiée de mise à mort — et comment l’indifférence internationale, les systèmes d’aide corrompus et les flux financiers ont contribué à sa continuité.

Source : ICIJ du 4 décembre 2025 par Whitney Joiner

An 1 de la Liberté en Syrie

Communiqué

Le 8 décembre 2024, nous fêtions la chute du régime sanguinaire de Bachar El Assad, qui a gouverné par la terreur en massacrant sa population et en recourant de manière systématique et institutionnalisée aux méthodes de torture les plus barbares.

Nous avons été remplis de bonheur, d’espoir, mais bien évidemment d’interrogation car nous savions que le groupe rebelle islamiste HTS, artisan de la chute du régime, ne correspondait pas aux concepts de Liberté, Justice et Démocratie que Revivre depuis plus de 20 ans plaide pour le peuple syrien.

Il y a 14 ans, les Syriens sont descendus dans la rue par millions, dans toutes les villes, pour exiger leur droit à la liberté et à la démocratie après des décennies de dictature.

La seule réponse du pouvoir à ces manifestations pacifiques fut – avec l’aide de la Russie de Poutine, de la République Islamique d’Iran et du Hezbollah – une répression meurtrière amenant légitimement le peuple syrien à résister par la lutte armée.

Les résultats de cette politique de terreur, ce sont plus de 500.000 morts, des dizaines de milliers de disparus, des dizaines de milliers de tués sous la torture, 7 millions de syriens réfugiés.

Après, 55 années de dictature et d’oppression des Assad, les Syriens souhaitent une transition guidée par la volonté de réconciliation et de pacification dans le respect des droits des syriennes et des syriens, quelle que soit leur communauté ou leur religion.

Les Syriens sont dans l’attente que la justice soit vraiment rendue pour les centaines de milliers de victimes de l’ancien régime d’autres organisations et milices de toutes sortes, mais aussi pour les victimes des graves exactions commises depuis le début de l’année (en mars sur la côte Ouest) et plus récemment dans la région de Souweida.

Cela fait maintenant 12 mois que le nouveau gouvernement de transition est en responsabilité d’un pays détruit, financièrement exsangue, fractionné et soumis à des tentatives de déstabilisation de l’intérieur comme de l’extérieur.

La levée définitive de toutes les sanctions économiques est nécessaire au redressement du pays.

En cet anniversaire du 8 décembre 2024, le chemin parcouru est conséquent, chaotique, et beaucoup reste à faire pour rassurer la population.

Nous avons le devoir de soutenir l’avenir d’une Syrie libre, unie, souveraine, stable, diverse et démocratique .

La Syrie n’est pas encore une démocratie, mais ce n’est plus une dictature.

Edito Newsletter 29

Octobre 2025

! Des braises attendent les vents mauvais…

Ce lundi soir du 6 octobre dernier, les FDS[1] ont attaqué des postes de contrôle du nouveau régime dans le quartier Cheikh-Maqsoud d’Alep. Rafales de mitraillettes et pilonnages aux mortiers se sont déversés dans la nuit[2]. Au même moment et à proximité, les responsables de Créative Memory for Syria préparaient l’organisation des tables-rondes « Survivor Witnesses » au musée d’Alep, en souvenir des détenus et disparus sous le régime de Bachar El-Assad. « Coups de feu… bruits d’explosions ou d’artillerie. Terrifiant. Couvre-feu en vigueur. Je suis en sécurité. »[3]

Actuellement, il y a d’un côté le langage des armes (souvent de milices incontrôlées et de militaires mal encadrés) qui tuent odieusement et de l’autre, des mots qui tentent de réparer les relations humaines ; parallèlement, des délégations étrangères défilent dans le pays pour participer à la reconstruction des infrastructures du pays et faire des affaires[4]. Voilà les trois tendances qui traversent la vie des quartiers, des villes, des régions, et de la Syrie toute entière.

Réouvrir la Citadelle d’Alep, produire plus d’électricité, relancer l’exportation du pétrole syrien, faire accoster des cargos de blé à Lattaquié, négocier un grand nombre d’accords économiques, etc. sont des signes très encourageants pour l’amélioration – indispensable – des conditions de vie de la population. Beaucoup sont au chevet du relèvement de l’économie du pays.

Malheureusement, cela n’effacera pas les rancœurs, les dénis et les haines – profondément ancrées – qui sont des braises qui attendent les vents mauvais…

Dans ce contexte les démocrates syriens et les bailleurs internationaux ne sont pas encore rassurés. Parmi d’autres, quatre situations illustrent leur inquiétude :

  • La conservation des traces et des preuves des crimes de Bachar El-Assad est en cours : les charniers sont recensés, des expositions sur les détenus et disparus sont réalisées, des associations de défense des droits humains collectent des témoignages, des organisations internationales peuvent enquêter sur les prisons et les disparus, etc. tout cela grâce au faible moyen de la société civile, … mais sans le soutien franc et massif du régime.
  • Le nouvel État doit être exemplaire pour établir la confiance. C’est ce qui ressort des rapports officiels de la commission d’enquête sur les massacres du mois de mars dans la communauté alaouite. Mais on attend encore les condamnations des commandants qui ont laissés faire ces massacres, ainsi que ceux de la région de Souweida (juillet). Les Syriens espèrent que ces rapports seront suivis d’effets, de façon transparente.
  • La très faible représentation des femmes et des minorités dans la première phase de l’élection-nomination (atypique[5]) de l’assemblée constituante, qui vient d’avoir lieu sur une partie du territoire, sera-telle corrigée drastiquement par les prochaines 70 nominations du président de la transition ?
  • La visite d’Ahmed El-Charaa au principal associé du « boucher de Damas » à Moscou réveille les traumatismes de ceux qui ont survécu à ses bombardements. Comment peut-il demander timidement l’extradition de Bachar Al-Assad sans exiger aucun compte des crimes de Poutine, son principal complice ? Redresser l’économie de la Syrie est-il plus important que le respect de toutes les victimes qui ont combattu le clan Bachar et l’armée russe ?   

Après tant d’années d’innombrables violations – odieuses – de la personne humaine, l’avenir de la Syrie ne peut pas dépendre de la brutalité de la force armée lors de la prochaine convulsion inter-communautaire qui ne fera que dégrader plus profondément la confiance générale.

Tout ce qui concourt au dialogue, à l’écoute, à la santé mentale, à l’expression de la vérité, à la manifestation de la justice, à la lutte contre la corruption, à la justice transitionnelle, à l’inclusivité, à la réparation, etc. doit mobiliser TOUS les moyens de l’État, avec l’aide des bailleurs internationaux et l’appui des associations locales.

Le retour sur investissement sur le respect de la personne humaine sera long, mais c’est la condition essentielle pour que la Syrie revive vraiment, dans sa diversité, sans répétition des crimes.

Frédéric Anquetil

Secrétaire Général de Revivre


[1] FDS : Forces Démocratiques Syriennes liées aux unités kurdes

[2] Deux morts : un membre des forces de sécurité intérieur du nouveau régime et un civil qui n’avait rien demandé. Des blessés dans tous les camps et chez les civils. Des dizaines de familles ont fui ces quartiers. Le siège du quartier kurde par le nouveau régime serait à l’origine de ce déchaînement de violence ?

[3] Message de Sana Yazigi le 6 octobre à 21h sur les réseaux sociaux

[4] Quelques jours avant cet incident, c’est un forum économique franco-syrien qui se réunissait à Damas.

[5] Un comité suprême de onze personnes nommées par le président de la transition a désigné des sous-comités dans chaque district qui détermine le collège électoral. Ce collège électoral a désigné 140 députés pour siéger au Parlement. Les 70 autres députés seront désignés directement par le Président. En l’absence de recensement et de document d’identité pour un grand nombre, et face à la grande dispersion de la population, cette méthode a le mérite d’être opérationnelle dans cette période de grande fragilité de la situation.

Edito Newsletter 28

De folles attentes … face au mur des réalités

Le rêve de démocratie qui fut autrefois le moteur de la lutte contre Bachar El Assad était (est ?) redevenu imaginable, mais il se prend le mur des réalités cruelles d’une Syrie détruite, désunie et déstructurée, matériellement et humainement. Après tant d’années de déceptions, de rancœurs, de haines, de mutismes, de douleurs, de frustrations, de méfiances, de doubles vies, de retournement d’alliance, de désespérances, de morts… les folles attentes de ce rêve initial peinent à se concrétiser. L’impatience est légitime.

La Syrie est une grande mosaïque communautaire politico-religieuse, fissurée de toutes part, dans laquelle chaque groupe, chaque tendance, chaque individu, espère voir émerger au plus vite son propre idéal dans les décisions du nouveau régime. Pour certains, le régime évolue vers un islam très rigoureux (« et bientôt une nouvelle dictature »), quand d’autres s’accrochent aux – insuffisants –  signaux d’inclusivité.

C’est bien connu, on parle plus souvent des trains qui n’arrivent pas à l’heure. En Syrie on parle beaucoup des nominations et des alliances de ceux qui furent – dans un passé que personne n’oublie – plus ou moins compromis avec le régime de Bachar Al Assad ou avec des jihadistes, et on commente abondamment les décisions peu démocratiques et/ou mal exécutées. Et malheureusement, les massacres font le gros de l’actualité, alors que beaucoup d’initiatives constructives avancent, à (très) bas bruit, sans faire l’actualité.

Il y a trop d’assassinats[1] et d’enlèvements commis par des groupes incontrôlés, les uns sectaires, les autres plus ou moins mafieux. C’est malheureusement le tribut de toutes les périodes post-conflits dans un pays dévasté[2]. Et on ne peut douter de l’activisme de la Russie, de l’Iran, des extrêmes droites, des pro-Bachar, des mafias, etc. qui parient sur le chaos. Quand il s’agit des comportements scandaleux de membres des troupes gouvernementale, l’abîme n’est pas loin. Avec une population qui a faim, chaque étincelle peut déclencher un désastre. A cela s’ajoute le jeu trouble d’Israël qui abuse d’un pays à terre. La théorie du chaos est parfaitement illustrée : dans un système instable, un évènement insignifiant peut déclencher une tornade. On y est.

L’État doit prendre au sérieux les rancœurs de tous bords, purger sa troupe des éléments incontrôlables et établir la sécurité – pour tous – au plus vite. La nouvelle Syrie ne peut être la continuation de la violence banalisée par le clan Assad sous d’autres étiquettes … rivales.

Les démocrates syriens ont été complètement surpris par le succès de HTC (aidé de son allié turc), et étaient dans l’expectative, jusqu’alors. En fait, aucune force politique n’était vraiment prête à gérer la Syrie après le 8 décembre. Pas même HTC qui tente de rattraper son retard grâce à sa position dominante au sommet de l’État.

Aujourd’hui dispersées politiquement, et extrêmement éparpillées géographiquement du fait de l’exil dans le monde entier, les forces politiques qui défendent la liberté, la justice et la démocratie vont devoir s’organiser à l’intérieur – comme à l’extérieur – de la Syrie pour espérer peser dans les décisions, aujourd’hui et demain. C’est urgent.

Frédéric Anquetil

Secrétaire Général de Revivre


[1] Déclaration de Revivre concernant le massacre dans l’Église St Elias à Damas le 2 juin 2025, et déclaration de Revivre concernant les massacres de juillet dans le sud de la Syrie.

[2] En France, l’épuration extra-judiciaire à la sortie de l’occupation allemande (qui a duré 4 ans), a entraîné la mort d’environ 9 000 personnes durant la première année (dont 30% par des résistants). Cela reste la partie honteuse de la Libération, mais il ne s’agissait pas de violence intercommunautaire sur base religieuse.

Plus de sang, plus de haine – Nous sommes tous Syriens et Syriennes.

Communiqué : Paris le 23 juillet 2025

Le drame de Soueida : vers un cessez-le-feu fragile et un avenir incertain

Depuis le 13 juillet 2025, la province de Soueïda est le théâtre d’affrontements d’une violence inédite entre milices druzes, tribus bédouines et forces de sécurité du gouvernement transitionnel syrien. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), le bilan humain est tragique : plus de 1 120 morts recensés au 20 juillet, dont 516 entre le 13 et le 17 juillet. De nombreux villages ont été incendiés et des centaines d’exécutions sommaires ont été rapportées, des victimes civiles des deux côtés.

Un cessez-le-feu, négocié sous l’égide des États-Unis, de la Turquie et de plusieurs pays arabes, est entré en vigueur le 19 juillet. Il a permis l’évacuation de quelque 1 500 civils bédouins vers Deraa sous escortes sécurisées et la reprise partielle de l’aide humanitaire. Cependant des épisodes de violence sporadiques persistent, avec des expulsions des familles bédouines et des exécutions sommaires documentées, malgré l’intervention de l’appareil sécuritaire du nouveau régime.

Parallèlement, Israël a mené des frappes aériennes ciblant des positions militaires syriennes à Soueïda et Damas, invoquant comme prétexte la protection de la minorité druze. Il apparaît que ces frappes ont visé le ministère syrien de la Défense et des bases militaires syriennes le 16 juillet. Ces frappes ne font que radicaliser les Syriens à l’égard d’Israël.

Un cessez-le-feu Israël–Syrie a été établi sous médiation américaine.

Une crise humanitaire d’ampleur

L’afflux de milliers de déplacés – plus de 128 500 personnes – a engendré une crise humanitaire sévère : routes coupées, hôpitaux saturés, services publics au bord de l’effondrement. Malgré l’arrivée des premiers convois d’aide sur site, la situation reste instable et alarmante.

En parallèle, d’autres violences ont ensanglanté la Syrie ces derniers mois :

  • En mars 2025, plus de 1 400 personnes, civils et militaires confondus, ont été tuées dans la zone côtière lors d’une attaque menée par des miliciens Alaouites affiliés à l’ancien régime de Bachar Al-Assad contre des soldats du gouvernement transitionnel. Cette attaque a déclenché une vague de violences sectaires d’une extrême intensité, non ordonnée par les autorités actuelles. Il s’agit là de l’épisode le plus meurtrier depuis la chute d’Assad.
  • En mai 2025, à Jaramana et Achrafiah’Sihnayah, en banlieue de Damas, un message blasphématoire non vérifié a provoqué une flambée de violences entre miliciens druzes et forces de l’ordre, entraînant la mort de plus de 100 personnes. Cet incident témoigne de la fragilité extrême du climat intercommunautaire et de la dangerosité des rumeurs dans un contexte de tension exacerbée.
  • Le 22 juin 2025, un attentat-suicide à l’église orthodoxe grecque Saint‑Élie a causé 25 morts et 63 blessés.

Cette montée de violences intercommunautaires fragilise toute perspective de paix durable, et met gravement en péril la cohésion sociale syrienne et les efforts de réconciliation.

Réactions internationales

Sur le plan régional, la Turquie, via son ministre des Affaires étrangères, a averti qu’elle interviendrait contre toute tentative de partition de la Syrie, accusant Israël de vouloir déstabiliser le pays en attisant les tensions entre Druzes et Bédouins.

Du côté occidental, les États-Unis ont exprimé une forte préoccupation. Le sénateur Marco Rubio annonce un appui diplomatique renforcé, tandis que l’envoyé spécial Tom Barrack confirme son rôle actif pour consolider le cessez-le-feu et dénoncer l’intervention israélienne, jugée contre‑productive.

Pour une paix juste et durable en Syrie

Il est impératif que :

  • Tous les responsables de massacres, d’exactions et de violences contre les civils soient traduits en justice, sans distinction de camp ou de confession.
  • Un véritable processus de justice transitionnelle soit mis en œuvre, fondé sur des principes d’indépendance, de transparence et de représentativité.
  • Les Syriens et Syriennes, quelles que soient leur origine ou leur foi, puissent enfin voir se concrétiser leur aspiration légitime à une Syrie libre, unie, plurielle, stable et démocratique.

Sans justice, il ne peut y avoir de paix durable. Sans reconnaissance des torts, il ne peut y avoir de réconciliation.

Il est temps d’engager un processus sincère de vérité, de réparation et de refondation nationale, afin que chaque Syrien et chaque Syrienne puisse vivre en sécurité, dans la dignité et la paix dans une Syrie libre, unie, plurielle, prospère, stable, souveraine et démocratique.

Attentat odieux dans une église de Damas

Une société syrienne qui fait preuve d’une remarquable maturité

Déclaration Revivre le 30 juin 2025

Dans notre communiqué du 10 mars 2025, nous écrivions : « Les vautours rodent au-dessus du peuple syrien ». Dimanche 22 juin, ils ont plongé sur leur proie, lors d’un attentat suicide dans l’église grecque-orthodoxe Saint Elie du quartier de Dwelaa, faisant 25 morts et 63 blessés. Cette tuerie est attribuée à l’organisation État islamique (EI). Le président syrien, Ahmed Al-Charaa, a promis de traduire en justice les personnes liées à cet odieux attentat, tandis que le Ministère de l’Intérieur informait que le chef de la cellule et cinq membres avaient été arrêtés, et deux autres tués.

Revivre partage la peine et l’inquiétude des familles et des proches de toutes ces victimes civiles. C’est la première fois depuis très longtemps que la communauté chrétienne est spécifiquement menacée (c’est la première fois que cela atteint un lieu de culte depuis la chute de Bachar Al-Assad, après l’échec d’un attentat déjoué dans un mausolée chiite). Le choix du lieu n’est pas anodin, il vise à la fois le régime (que l’EI considère comme insuffisamment rigoriste) et indirectement l’occident chrétien qui renoue avec la Syrie du nouveau régime.

Alors que dans le quartier chrétien de Bab Touma à Damas, lundi soir, des centaines de manifestants ont scandé « Gloire au Christ » et « le sang des Chrétiens est précieux », sans le moindre incident, le grand Mufti de Syrie Oussama al Rifaï, rejetant toute attaque contre les lieux de culte, exprimait ses condoléances aux familles des victimes. La majorité des Syriens n’est pas dupe de ces tentatives de déstabilisation.

Les réactions immédiates venant de la communauté internationale sont encourageantes. La France a rappelé aussitôt « son engagement en faveur d’une transition en Syrie qui permette aux Syriens et aux Syriennes, quelle que soit leur confession, de vivre en paix et en sécurité dans une Syrie libre, unie, plurielle, prospère, stable et souveraine » ; ce à quoi Revivre s’associe pleinement.

Il est malheureusement probable que cet attentat ne sera pas le dernier atteignant un symbole national. La sécurité est vraiment l’un des plus grands défis pour les nouvelles autorités syriennes. Pour cela, nous les invitons à ne pas négliger l’aide ponctuelle de pays étrangers (financements, formation, matériels, renseignements) pour lutter – souverainement – contre le fléau de ces extrêmes qui sont à l’affût, tant les vautours sont nombreux.

Il est impératif de réussir les débuts de cette transition vers une Syrie Libre et Démocratique.

Témoin de justice : en quête de responsabilité et de justice en Syrie – quoi faire ?

le 28 mai 2025 – Paris

Un groupe diversifié de parties prenantes – dont des ONG, des défenseurs des droits de l’homme, des experts juridiques, des représentants politiques et des décideurs – se joint à nous aujourd’hui à la Ville de Paris pour discuter de l’avenir de la justice et de la responsabilité en Syrie.

A diverse group of stakeholders — including NGOs, human rights advocates, legal experts, political representatives, and policymakers — joins us today at the City of Paris to discuss the future of justice and accountability in Syria.

تنضم إلينا اليوم في مدينة باريس مجموعة متنوعة من الأطراف المعنية — من منظمات غير حكومية، ومدافعين عن حقوق الإنسان، وخبراء قانونيين، وممثلين سياسيين، وصنّاع سياسات — لمناقشة مستقبل العدالة والمساءلة في سوريا

Partners/Orgs:

  • @CaesarFiles
  • @ACHR 
  • @Revivre_FR 
  • @CityOfParis 
  • @Genevieve_Garrigos 

Newsletter 26

La nouvelle Syrie marche sur des œufs, … mais elle marche

Depuis 5 mois, les Syrien-ne-s vivent dans un entre-deux, sortant d’un passé épouvantable et étouffant, et avançant lentement à la fois hébété et dans une joie indicible, vers un avenir incertain qui peut basculer, d’un coup ou lentement, vers le meilleur ou vers le pire.

Les massacres du début mars 2025, déclenchés par une tentative d’insurrection des fidèles de l’ancien régime de Bachar Al-Assad auxquels des milices islamistes ont répondu par une vengeance aveugle inhumaine, sont un avertissement : ce qui était probable, est malheureusement advenu. Plus récemment, les attaques contre des druzes à partir de la propagation d’un message blasphématoire faussement attribué, a dégénéré en combats entre des factions armées diversement affiliées… Il ne suffit que d’une rumeur ou d’un conflit très localisé pour que la situation s’emballe aussitôt et dégénère. La preuve est ici faite que la nouvelle Syrie marche sur des œufs, … mais elle marche… certes avec difficulté.

Les nouvelles autorités – en sous-effectif de personnel compétent – reconstruisent un tissu de relations pour refaire Nation, et pactise avec tous les pays voisins pour attirer les partenariats et obtenir la levée des sanctions internationales. En imposant des conditions préalables disproportionnées qui vont différer durablement la levée des sanctions, les Syriens progressivement aigris ne risquent-ils pas d’être poussés dans les bras de tous ces groupes sectaires ou extrémistes plus ou moins en veilleuse. Malgré les nombreux signes d’ouverture posés par le nouveau régime en quelques mois (certes tout n’est pas parfait), il n’y en a pas encore assez pour plaire à la plupart des chancelleries. A partir de quand la France ouvrira-t-elle son ambassade pour manifester son appui aux forces de la liberté et de la démocratie, que portent des réfugiés syrien-ne-s sous protection internationale de la France ?

Les amis de l’ancien régime de Bachar – y compris en France où ils sont nombreux – ne manquent pas de taper sur les nouvelles autorités à la moindre occasion, de demander à El-Charaa un certificat de déradicalisation, de grossir le moindre évènement qui alimente leurs thèses, de diffuser de fausses informations, de semer la peur, etc. On n’en demandait pas autant quand ces nombreuses délégations politiques négociaient la normalisation des relations avec Bachar Al-Assad.

Pendant que les nouvelles autorités engagent des concertations et des accords avec un grand nombre d’institutions, la société civile syrienne fourmille d’une grande quantité d’initiatives, de toute nature, le plus souvent en étroite relation avec sa vaste diaspora de réfugié-e-s.

N’est-ce pas cette société civile qui a facilité la prise de pouvoir par la modeste troupe armée de HTC en décembre 2024 (certes bien coordonnée) ? N’est-ce pas elle qui périodiquement parvient à bloquer certaines décisions radicales de HTC ? N’est-ce pas elle qui s’est aussitôt préoccupée du sort des détenu-e-s et des disparu-e-s ? N’est-ce pas elle qui s’auto-organise dans les hôpitaux, les écoles, dans la vie de quartier, etc. pour compenser l’absence d’Etat ? N’est-ce pas l’image de sa vivacité qui devrait retenir l’attention des chancelleries ?

La chance de la nouvelle Syrie – dans cet entre-deux très incertain – est sa société civile associée à son énorme diaspora qui s’est formée dans les pays de refuge. C’est sa force ; c’est peut-être son ultime assurance-vie face aux erreurs du nouveau régime, aux lourdeurs des institutions internationales, aux agressions sporadiques des anciens amis de Bachar, aux pays voisins semeurs de chaos et aux reliquats de milices islamistes.

Que l’on arrête de souffler sur les braises encore chaudes de 54 ans de dictature et de divisions ! 

Aidons cette société civile à traverser cet entre-deux vers une Syrie Libre et Démocratique. 

Frédéric Anquetil

Secrétaire Général de Revivre

Israël doit cesser d’atteindre à la souveraineté de la Syrie

Communiqué : Paris le 16 avril 2025

Au mépris des règles du droit international, dès le 8 décembre 2024, date de la chute et la fuite de Bachar Al-Assad, Israël a envoyé des troupes pour s’emparer d’une zone tampon démilitarisée du Golan (où patrouille l’ONU dans le sud-ouest de la Syrie) et bombarde de nombreuses zones du territoire, sans ménagement pour les populations civiles.

Depuis cette date, selon le décompte de Charles Lister, spécialiste de la Syrie, l’aviation israélienne a mené plus de 730 frappes ! Plus récemment, le mercredi 2 avril, des frappes israéliennes ont détruit l’aéroport militaire de Hama, faisant plusieurs victimes dont quatre militaires et 12 blessés. L‘aéroport militaire T4, dans la province de Homs a également été détruit. Ce même jour, une frappe aérienne a visé les abords du bâtiment de recherche scientifique, déjà bombardé par le passé, dans le quartier de Barzeh à Damas.

 Le jeudi 3 avril, l’armée israélienne a mené une opération dans le sud de la Syrie, déclarant avoir répondu à des tirs d’hommes armés, ajoutant avoir tiré sur plusieurs combattants qui ont été éliminés. Selon les autorités de la province de Deraa, plusieurs civils ont été tués et d’autres blessés, à la suite d’un bombardement israélien près de la ville de Nawa. Ces bombardements sont intervenus après une incursion en profondeur des forces israéliennes, provoquant une réaction des civils de la région qui ont pris les armes pour s’opposer à l’avancée des troupes israéliennes.

Les propos du ministre israélien de la Défense, Israël Katz, menaçant les nouvelles autorités syriennes de payer un « lourd tribut » si la sécurité d’Israël était menacée doivent nous interroger sur la stratégie du gouvernement israélien vis à vis d’un peuple, libéré de 55 années de dictature, qui aspire à reconstruire son pays dans la paix, et qui n’a strictement aucunement les moyens militaires de menacer Israël, d’une quelconque façon.

L’effondrement du Hezbollah en Syrie illégitime toute action d’Israël ; quant à la Turquie membre de l’OTAN, elle n’a ce jour, émis la moindre perspective d’y installer des bases militaires.

Nous interpellons les chancelleries occidentales, et tout particulièrement la France, pour faciliter  des négociations entre la Syrie et Israël afin de faire respecter :

La résolution 242 du Conseil de sécurité après la guerre de Six-Jours en juin 1967, demandant à Israël de se retirer du Golan syrien.

– La résolution 497 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée à l’unanimité le 17 décembre 1981 déclare que la loi israélienne qui annexe le Golan syrien est « nulle et non avenue et sans effet juridique international ». 

Revivre condamne les actions israéliennes de déstabilisation qui sont une violation flagrante du droit international et de la souveraineté syrienne entravant les Syriens dans leur destinée pour une Syrie Libre et Démocratique

Les vautours rodent au-dessus du peuple syrien

Communiqué : Paris le 10 mars 2025

Les violences ont été déclenchées jeudi 6 mars par une attaque de partisans du président déchu Bachar el-Assad contre des forces de sécurité à Jablé, au sud de Lattaquié contre un grand nombre de positions et points de contrôle des forces gouvernementales syriennes. Une patrouille de la sécurité était tombée dans une embuscade tendue par des hommes armés, faisant treize morts et plusieurs blessés parmi les forces du nouveau régime.

Tout indique que les attaques ont été préméditées, bien coordonnées et planifiées. Les assauts d’hommes lourdement armés et disposant notamment de systèmes de communication ont été simultanés.

En réponse, le déploiement de renforts des forces gouvernementales syriennes, arrivés le vendredi, a donné lieu à d’intenses combats qui se sont poursuivis toute la journée dans une atmosphère chaotique. Des tueries de masse ont été perpétrées par des milices hors de contrôle. Alors que les hostilités ont depuis samedi pris fin, le bilan à ce jour est incertain ; les combats auraient fait plus de 1300 morts dont au moins 800 victimes civiles.

Le Ministère de l’Intérieur a annoncé enquêter sur ces violences, assurant que les auteurs seront poursuivis ; de son coté, le président syrien Ahmad al-Chareh, a adopté un décret instituant une commission « indépendante » chargée d’enquêter. Il importe que la Commission des droits de l’homme de l’ONU soit partie prenante de cette enquête.

Cet épisode tragique est prétexte à des manipulations sur les réseaux sociaux par toutes les forces intérieures et étrangères, y compris en France, nostalgiques du régime de Bachar El Assad, hostiles au changement en Syrie et aux espoirs de liberté de la population syrienne qui fait face à d’énormes difficultés.

Les appels « sauvez nous de ce régime cruel » bien reçus par Israël (et la Russie) de certains dirigeants alaouites et druzes, l’empressement de l’Iran à condamner le nouveau régime servent d’autres intérêts que ceux d’une nouvelle Syrie libre et démocratique, ils n’auront pour effet que d’alimenter les divisions qui entraînent vers la spirale de la violence.

Si les chancelleries occidentales ont condamné, à juste titre, les massacres contre les civils, il importe aujourd’hui de ne pas rajouter du chaos au chaos en repoussant l’aide humanitaire promise et surtout la levée des sanctions financières et commerciales.

Aujourd’hui plus que jamais nous avons un devoir de solidarité et de vigilance pour aider les Syriens à prendre en main leur destinée pour une Syrie Libre et Démocratique.

Newsletter 25

Syrie, une nouvelle ère

Depuis la chute et la fuite du clan Assad, le 08 décembre 2024, la Syrie est entrée dans une nouvelle ère. Les nouveaux maîtres de Damas ont hérité d’un pays exsangue, détruit, appauvri et divisé.

Les défis sont donc énormes et les moyens manquent.

En Syrie, la population respire, l’état de liesse et de célébration est palpable, mais cela ne peut durer éternellement. Il faut assurer les besoins primaires, eau, électricité, carburant et payer les salaires.

Il faut assurer la sécurité au quotidien, mise à mal avec l’effondrement des services de police et de justice.

Il faut réunifier le pays, retirer les armes des différents groupes pour qu’elles deviennent le monopole d’une armée unique, installer un système de justice transitionnelle, indispensable pour commencer une réconciliation dans une société fracturée, remettre l’économie en marche et lutter contre la pauvreté et contre le chômage, reconstruire les infrastructures et les habitations.

Il faut créer un nouveau régime politique qui répondrait aux aspirations des Syriens et récompenserait leurs longues années de lutte et de sacrifices et qui doit être en écho avec les slogans de leur révolution : liberté et dignité.

Des enjeux énormes qui ne peuvent être réussis sans le concours de tous, sans la levée des sanctions économiques qui frappent toujours la Syrie et sans l’engagement et la bonne volonté, à prouver, du nouveau pouvoir.

Le passé djihadiste du pouvoir actuel alimente un certain pessimisme, ainsi que des incidents parfois graves, vrais ou exagérés par les médias.

Cependant, il faut prendre en compte les déclarations prometteuses et l’évolution en direct du discours « officiel », les promesses de surprises agréables à l’annonce du nouveau gouvernement de transition début mars, l’état d’esprit du pays et du peuple qui n’acceptera jamais d’être de nouveau soumis au despotisme, peu importe son identité idéologique, la pression régionale et internationale…

En prenant en compte tous ces éléments, en plus de l’engagement des forces vives du pays dans l’action publique, revendicative et constructive, comblant le vide laissé par l’effondrement du régime criminel d’Assad, on peut se permettre de dire aujourd’hui qu’en Syrie :

L’optimisme est permis, mais la vigilance s’impose !

Alaa Abdelwahab

de retour d’un voyage en Syrie début février 2025 (Alep, Homs, Damas)

 Co-président de Revivre

Newsletter 24

Une joie immense… bientôt contrariée par l’inertie occidentale ?

Dans les semaines qui ont suivi la chute de Bachar el-Assad, une JOIE IMMENSE – mêlée de pleurs intarissables – a été ressentie par la population. Et encore aujourd’hui ! Des milliers de familles sont descendus dans les rues le vendredi 13 décembre pour célébrer leur liberté, toute nouvelle, sans y être contraints d’aucune manière. Aucune restriction de circulation, aucune habilitation pour les journalistes (jusqu’alors), les Syrien-nes leur demandent de les filmer à visage découvert, y compris avec des membres armés de HTC,… ce qui était totalement impensable depuis des dizaines d’années.

Ce qui est malheureusement incroyable, aussi, c’est que presque TOUTES les familles syriennes ont des histoires d’emprisonnement, de torture, de bombardement, de gazage du régime des Bachars.  Pendant 54 ans, les Syrien-nes n’ont pas eu le droit de parler librement. D’ailleurs, les anciens prisonniers n’osent pas encore parler de tout, devant n’importe qui, ils ont encore peur… Prudemment, les discussions s’engagent, en évitant les mots utilisés auparavant par les pro-Bachar tel que « défense des minorités », « état laïc », « différentes communautés religieuses », etc, pour ne pas apparaître comme des opposants à HTC. Ces mêmes mots ont tant été utilisés pour monter les Syriens les uns contre les autres. 

Plus que jamais, la justice transitionnelle est nécessaire afin de responsabiliser les criminels de l’ancien régime, de permettre aux familles des disparus de connaître leur sort et de faire leur deuil. 

Quelques groupes de discussions émergent dans le pays ; certains à l’instar de ceux du printemps de Damas de 2011, mais d’autres autour d’anciens « assadistes » qui ont retourné leur vestes (ce qui ne trompe personne)… 

On voit parfois des femmes et des hommes qui, de leur propre initiative, nettoient les rues, gèrent la circulation, préparent des repas au personnel soignant ou aux plus démunis. Ce n’est plus « la Syrie d’Assad », c’est maintenant « Leur Syrie ». D’où qu’ils soient, les Syriens disent, fièrement maintenant, qu’ils sont tous – tout simplement – Syriens.

Mais pour l’instant, ce sont de mesures extrêmement concrètes dont la population a expressément besoin : de l’eau, de l’électricité, de la nourriture, du carburant, un toit, etc. Toutes choses qui restent inatteignables à cause des sanctions internationales qu’il faut impérativement lever, et rapidement.

La communauté internationale et leurs médias vont-ils continuer à s’offusquer de la poignée de main non tendue d’al-Charaa… quand les mêmes n’avaient rien à redire des cordiales poignées de main – il n’y a pas si longtemps – de certains élus à Bachar el-Assad ? Vont-ils continuer à s’interroger sur le retour rapide des réfugiés syriens … dans un pays dévasté, totalement incapable matériellement de les accueillir par millions ? 

Pour que la population syrienne continue de se libérer par elle-même, il faut lever les sanctions internationales, et délivrer des autorisations exceptionnelles de voyager pour les réfugiés sous protection internationale (sans perte de leur statut). 

Qu’attend-on encore pour que les Syriens puissent enfin REVIVRE ?

Le CA de Revivre

La plupart de ces propos sont extraits de la table ronde organisée par Revivre et la Mairie de Paris 20° le mercredi 15 janvier 2025 autour de Garance LECAISNE, Edith BOUVIER et Ammar ABD RABBO, de retour de Syrie.

=> Consulter par newsletter 24 – Janvier 2025

Nous avons encore besoin de vous !

Il vous reste quelques jours pour faire vos dons défiscalisés (si vous êtes imposables sur le revenu)

La chute de Bachar el-Assad nous conduit à redéployer avec détermination nos actions en Syrie qui vous ont été présentées dans notre dernière campagne d’appels à dons. Après une courte période d’observation, voici comment REVIVRE va poursuivre ses actions en cours :

  • Concernant les camps de Roukban (zone ouest), quelques familles ont commencé à rejoindre Palmyre (dont elles sont originaires en majorité), où elles se réinstallent dans une grande précarité pour l’instant. L’amour d’une terre est indéfectible ! En conséquence de quoi, l’école des camps de Roukban va dans les prochains mois retourner à Palmyre. Deux défis se présentent donc : la réhabilitation de bâtiments scolaires, et l’accueil d’un plus grand nombre d’enfants par le retour des familles provenant des pays voisins.
    • C’est pourquoi nous avons besoin de vous pour continuer à accompagner le collectif de la Maison de Palmyre avec lequel nous cheminons depuis plus de 5 ans.

  • Concernant les camps de la zone d’Idleb, Afrin et Janderes (zone est), certaines familles ont tenté de réintégrer leurs domiciles d’origine, en particulier dans la région de Homs, mais sont déjà revenues. Leurs maisons ont été détruites par les bombardements russes et ceux de Bachar ; soit il n’y a plus rien, soit il n’en reste que des morceaux inhabitables et dangereux. En outre, il y a peu de nourriture, peu d’ONGs, et les réseaux (eaux, électricité) sont incapables de fournir. Il faudra donc continuer à distribuer de l’eau potable dans les prochains mois dans les camps. Deux défis se présentent donc : augmenter cette distribution d’eau potable (compte-tenu du retour des familles provenant des pays voisins, du temps nécessaire pour tout reconstruire, et du prochain été).
    • C’est pourquoi nous avons besoin de vous pour continuer cette distribution d’eau potable, car les camps vont rester une solution d’hébergement qui va malheureusement durer.

Avec nos partenaires syriens sur le terrain,

qui furent les partisans de la Liberté et de la Démocratie

dans les heures les plus sombres de la Syrie,

poursuivons notre soutien à leurs projets sociaux !

Don par chèque bancaire à l’ordre de :

Association Revivre

Courrier : 100 boulevard de Belleville 75020 PARIS

→ Don en ligne sur :

Que d’émotions !

Chers ami-e-s de Revivre,

Les Syriens viennent de mettre fin en quelques jours à 54 ans de dictature de Père en Fils. Bachar depuis mars 2011 – avec plus de 500.000 morts, des dizaines de milliers de disparus, des dizaines de milliers de tués sous la torture, 8 millions de syriens réfugiés – a très largement surpassé Hafez son géniteur.

Cette chute soudaine est un moment de très grande émotion pour l’ensemble des Syriens et des amis de ce peuple – notamment Revivre – qui lutte depuis sa création pour la disparition de ce pouvoir criminel et la protection de ceux qui en sont victimes.

Aujourd’hui, nos médias découvrent, lors de la libération des prisons, l’horreur qui avait été abondamment décrite par Michel Seurat dans son livre « Syrie, l’État de Barbarie » ou dans « La Coquille » de Moustafa Khalifé ; plutôt, ils font semblant de le découvrir, car Revivre, avec d’autres ONGs, dénonce depuis de très nombreuses années la barbarie du régime syrien.

La Paix sans Justice sera impossible ! Il est donc urgent de donner un peu de temps aux nouveaux dirigeants de Damas pour qu’ils posent les premières fondations d’une vraie Justice… chose que la Syrie n’a jamais connue !

Il importe ici que la France n’agisse pas dans la précipitation par des mesures administratives en contradiction avec la Convention de Genève relative au statut des réfugiés.

Chers amis de Revivre, nous avons un devoir de solidarité et de grande vigilance pour que les Syriens puissent prendre en main leur destinée afin de construire une Syrie Libre et Démocratique.

La Syrie doit REVIVRE

Newsletter n°23

Cela dure depuis plus de 54 ans  !

… « L’officier m’attend à la porte du bureau. La rage suinte de son regard… Il continue à lire et à frapper. Je suis étalé par terre, il m’écrase la bouche avec sa chaussure, puis il la déplace sur mon cou et se met à appuyer. Il me broie et me pétrit de ces deux pieds. Je comprends que ce que j’ai dit contre « M. Le Président » suffit en soi pour que je sois pendu par les testicules.

Ensuite, il donne des instructions à un agent en braillant à s’en étrangler.

Trois jours que je n’oublierai jamais. Fouet ; coups ; pneu ; tapis volant ; électricité… Des pinces sont fixées à mes partie sensibles et on branche l’appareil. Mon corps se met à danser une danse électrique. J’ai l’impression que je vais rendre le dernier soupir… ».

Ceux sont là quelques mots de Moustafa KHALIFE – dans son roman La Coquille (Actes Sud 2007) – qui décrivent la violence innommable des conditions carcérales sous le régime d’el-ASSAD-père. Son témoignage – tout dans la retenue lors de la première table ronde de la soirée anniversaire des 20 ans de Revivre- est glaçant. La Coquille est à la fois un roman et une minutieuse documentation de ce qu’il a vécu dans sa chair pendant ses 13 ans de détention.

Avec son stylo-bille, Najah ALBUKAI reproduit des centaines de ces horribles scènes de torture que, lui aussi, a subie ou observées lors de trois périodes d’emprisonnement sous le régime d’el-ASSAD fils. Son témoignage – avec une étonnante dérision lors de cette même table ronde – atteste des mêmes atrocités insoutenables. Une déshumanisation abyssale !  Y survivre est inimaginable.

Dans la seconde table ronde, Jihad YAZIGI nous a décrit les flux financer de l’aide humanitaire qui parviennent en Syrie… et sur lesquels le régime prélève une bonne part.

Arrêtons-nous sur la question de la fin de cette soirée posée par Clémence BECTARTE qui, depuis plus de 10 ans avec des collègues avocats et des journalistes, enquêtent et documentent sur les tortionnaires réfugiés en Europe : « Pourquoi continuer encore à se battre contre l’impunité des tortionnaires pour si peu de résultat à l’échelle du problème ? » Encore trop peu d’entre eux ont pu être poursuivis en justice.

Au-delà de l’importante de faire justice contre l’impunité, il faut continuer à révéler au grand jour les méthodes – encore partagées par tous les amis de la Syrie de Bachar – de destruction radicale de la personne humaine, utilisées pour extorquer des aveux (le plus souvent faux), pour obtenir une soumission totale, pour supprimer des personnes et faire régner la terreur chez une moitié du peuple syrien par l’autre moitié. Plus de 54 ans que cela dure ! 

Avant de promouvoir la « normalisation des relations » avec la Syrie, que chaque diplomate, que chaque politicien, prenne le temps de lire attentivement « La Coquille » de Mustafa KHALIFE et/ou  « Tous témoins » (Actes Sud) de Najah ALBUKAI, et regarde les photos du dossier César… et qu’il s’interroge sur ce qui va véritablement être « normalisé ».*

Le CA de Revivre le 2 décembre 2024

  • : Jusqu’à fin novembre, nombre de pays souhaitaient encore (!) une « normalisation » comme porte de sortie à l’aube des évènements actuels. (ndlr du 9/12/2024)

=> Lire la Newsletter 23 – Décembre 2024/1

SOIRÉE ANNIVERSAIRE des 20 ans

=> Vous n’étiez pas à l’Institut du Monde Arabe le jeudi 24 octobre 2024 ?

Alors, rendez-vous sur la page des 20 ans pour voir un aperçu de cette belle soirée, riche en émotions.

FILM – Revivre, 20 ans après

Réalisation : Mahmoud HAMOUD avec Abdulrazak ALJUMAA et Emilie GLASMAN

Montage : Ahmad MUADDAMANI

Mixage son : Rita MAHMOUD

Traduction : Abdulrazak ALJUMAA

Interviews (dans l’ordre d’apparition) :

  • Assem HAMSHO – Photographe et activiste syrien
  • Michel DUCLOS – Ancien Ambassadeur de France en Syrie de 2006 à 2009
  • Aïcha ARNAOUT – Poétesse et activiste franco-syrienne
  • Pascale BRICE – Ancien Directeur de l’OFPRA de 2012 à 2018
  • Michel MORZIÈRE – Membre fondateur et président d’honneur de l’Association

Newsletter 22 – Edito

En 2004, en créant Revivre nous ne pensions pas que, 20 ans plus tard, le peuple syrien serait ainsi martyrisé, et la Syrie fracturée livrée à la dictature d’un clan, au trafic de drogue, à l’obscurantisme et à l’intolérance.

Au cours de ces 20 années passées, Revivre a pu travailler, collaborer, échanger avec des syriens et syriennes – aujourd’hui disparus – dont l’humanité et le combat font l’honneur de ce pays. Nous pensons tout particulièrement à Riyad Turk, Razan Zetouney, Fadwa Souleyman, Salameh  Kailéh, Abbas Abbas, Dr Al Rayer, Michel Kilo.

Nous pensons à Imad Chiha, à Farez Mourad emprisonnés pendant 30 ans, et à Haissam Nahal pendant 28 ans.

Nous pensons à l’immense cohorte d’anonymes – femmes, hommes et enfants – broyés depuis 1970 par le régime – de père en fils – et ses affidés. 

Nous pensons à ceux qui furent les premiers artisans de Revivre : Wladimir Glasman et son épouse Vivianne, présidente de Revivre, Sakher Farzat notre premier président.

Nous pensons à ces femmes activistes, anciennes prisonnières du régime qui perpétuent aujourd’hui leur engagement dans le « mouvement du 26 novembre ».

Comment ne pas associer à cette commémoration, ces milliers de femmes, hommes et enfants, réfugiés en France dans la douleur de l’exil. Depuis 12 ans, nombreux ont été accueillis à notre permanence.

Comment ne pas se révolter pour toutes ces familles fracturées qui depuis des mois, voire des années, ne parviennent à obtenir de nos autorités consulaires des visas pour enfin se rassembler et enfin revivre.

Les rapports de la Commission d’enquête indépendante et internationale de l’ONU sur la Syrie mettent l’accent sur la souffrance des civils qui subissent depuis plus d’une décennie, crimes, bombardements, transferts de population, disparitions forcées et privations de liberté.

Jamais nous n’accepterons que les bourreaux puissent être réhabilités et soient un jour fréquentables par nos dirigeants.

Par nos actions de plaidoyer pour la Syrie martyrisée, c’est notre propre Humanité que nous préservons.

Merci à vous tous, bénévoles, adhérents, donateurs. Sans vous rien ne serait possible.

Merci à vous tous, journalistes, avocats, chercheurs, juristes, activistes, qui contribuez à documenter et à refuser l’impunité des bourreaux.

Les graines de la Démocratie et de la Justice ont été semées en Syrie. Revivre, à la mesure de ses moyens, devra avoir la ténacité de les faire fructifier.

Pour une Syrie Libre et Démocratique, ensemble, nous ne lâcherons rien.

Michel MORZIERE

Président d’honneur de Revivre

Newsletter 21 – Edito

Normaliser les violations des droits humains, jamais !

Au moment où l’Iran – aidé de tous ses proxys – promet un déluge de feux sur Israël, des membres de l’UE veulent renouer avec le boucher de Damas. Aujourd’hui, huit Etats membres de l’UE[1] demandent un début de normalisation des relations avec le régime de Bachar Al-Assad ! Unique but : faciliter les renvois de Syriens … et plaire à des opinions publiques xénophobes. L’extrême droite française n’aurait pas manqué de se joindre à la fine équipe si elle avait gagné les dernières élections nationales, en nommant Thierry Mariani aux Affaires Etrangères et Eric Ciotti à l’Intérieur (méfions-nous, car ce n’est que partie remise pour 2027).

Normaliser avec la Syrie, c’est normaliser avec le Hezbollahperfusé par les centaines de millions de dollars de l’Iran – qui profite depuis des années de ses accointances privilégiées avec le régime de Bachar al-Assad pour convoyer des armes de tous calibres et des miliciens par centaines vers le Sud-Liban. Tout cela sous les regards bienveillants des militaires russes implantés dans leurs bases militaires en Syrie, sans lesquels le régime de Bachar Al-Assad serait tombé depuis longtemps. Tous sont liés !

Faut-il rappeler à l’Autriche, l’Italie, Chypre, etc. les scores de violations des droits humains qui sont les normes dans ces pays-là ? L’Iran : 853 condamnations à mort par pendaison en 2023[2], Russie : 10 000 condamnés accusés de discrédit de l’armée vis-à-vis de la guerre en Ukraine, la Syrie : au moins 43 morts sous la torture et 756 arrestations arbitraires depuis 9 mois, etc… Beaucoup des syriens renvoyés du Liban ou de Turquie passent par la case prison … syrienne, de façon arbitraire et sans jugement.

Pactiser un tant soit peu avec la Syrie de Bachar, c’est laisser gagner la gangrène des violations des droits humains. Normaliser avec la Syrie de Bachar, c’est normaliser avec l’Iran des mollahs, le Hezbollah de Nasrallah, la Russie de Poutine, la Corée du Nord, etc. Lequel de ces membres de l’Union Européenne va ensuite être le premier à demander aussi la légalisation de la torture … pour des cas d’exception pour commencer ?

Depuis 20 ans, Revivre dénonce ces violations des droits humains en Syrie[3]. Triste anniversaire. Nous marquerons cette date par une soirée de rencontres pour faire mémoire, se consoler, analyser et regarder l’avenir. Rendez-vous le jeudi 24 octobre à l’Institut du Monde Arabe à Paris. Ami-e-s de la Syrie libre et démocratique, nous vous attendons nombreux.


[1] Autriche, Chypre, Croatie, Italie, Grèce, Slovaquie, Slovénie, République Tchéque,

[2] https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2024/04/iran-executes-853-people-in-eight-year-high-amid-relentless-repression-and-renewed-war-on-drugs/#:~:text=Le%20nombre%20d’exécutions%20en,exécutions%20recensées%20au%2020%20mars.

[3] https://association-revivre.fr/un-proces-qui-grave-dans-le-marbre-les-crimes-du-regime-de-bachar-al-assad/

=> Newsletter n°21 – Septembre 2024

Une nouvelle victoire contre l’impunité de Bachar Al – Assad

La cour d’appel de Paris a validé, mercredi 26 juin, le mandat d’arrêt émis par des juges français contre le président syrien Bachar al-Assad, accusé de complicité de crimes contre l’humanité pour des attaques chimiques meurtrières au gaz du 5 août à Adra et Douma, et du 21 août 2013 dans la Ghouta orientale, banlieue de Damas, faisant plus de 1 000 morts et des centaines de blessés. 

Par cette décision, la chambre de l’instruction a rejeté la requête du Parquet national antiterroriste (Pnat), qui demandait l’annulation du mandat au motif de l’immunité personnelle des présidents en exercice. 

Le Pnat considérait que les exceptions à l’immunité personnelle des chefs d’Etat en exercice sont « réservées au seul bénéfice des juridictions internationales », comme la Cour pénale internationale, et non des tribunaux de pays étrangers. La Chambre de l’instruction de Paris en a décidé autrement !

Les quatre mandats d’arrêt pour la planification présumée des attaques chimiques visant Bachar al-Assad, son frère Maher, ainsi que les généraux, Ghassan Abbas et Bassam al-Hassan peuvent ainsi être exécutés.

Cette décision de la justice française arrive peu après la condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité le vendredi 24 mai 2024 par la Cour d’assises de Paris de trois membres de l’entourage de Bachar al-Assad : Ali Mamlouk (ex-chef du Bureau de la sécurité nationale), Jamil Hassan (ex-directeur des services de renseignements de l’armée de l’air), et Abdel Salam Mahmoud (ex-directeur de la branche investigation de ces services) accusés de la disparition forcée et de la mort sous la torture de deux franco-syriens.

Non à l’impunité pour les responsables des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. La Justice doit passer !

Un procès qui grave dans le marbre les crimes du régime de Bachar Al-Assad

Communiqué du 25 mai 2024

Trois hauts responsables du régime syrien, jugés pour complicité de crimes contre l’humanité et délit de guerre, ont été condamnés vendredi 24 mai 2024 par la justice française à la réclusion criminelle à perpétuité.

La cour d’assises de Paris a jugé coupable – de la disparition forcée et de la mort sous la torture de deux franco-syriens – trois membres de l’entourage de Bachar al-Assad : Ali Mamlouk (ex-chef du Bureau de la sécurité nationale, la plus haute instance de renseignement en Syrie), Jamil Hassan (ex-directeur des services de renseignements de l’armée de l’air), et Abdel Salam Mahmoud (ex-directeur de la branche investigation de ces services).

« C’est le premier procès qui juge et condamne pour complicité de crimes contre l’humanité de si hauts responsables du régime syrien », a déclaré à la sortie du tribunal Me Clémence Bectarte, qui défendait plusieurs parties civiles dans ce dossier.

Aujourd’hui, la situation en Syrie reste marquée par une totale impunité ; le peuple syrien martyrisé attend toujours que la justice passe concernant des centaines de milliers de victimes.

Durant les audiences, plusieurs experts et rescapés des geôles syriennes ont défilé à la barre pour décrire le système politique et carcéral syrien et témoigner des horreurs subies en détention. Des photos du dossier César, du nom d’un ex-photographe de la police militaire qui s’est enfui de Syrie en 2013 avec 46.000 photographies effroyables de corps torturés, ont été diffusées à l’audience.

Ce procès, c’est bien évidemment celui du président Assad lui-même.

Revivre exhorte tous les dirigeants européens, et tout particulièrement les dirigeants de notre pays, à ne jamais normaliser les relations avec Bachar al-Assad et ne jamais réhabiliter un criminel qui martyrise son peuple.

Non à l’impunité pour les responsables des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, comme ce vendredi 24 mai 2024 à Paris. La Justice doit passer !

Newsletter n°17

Et la boucle …sera bouclée ?

De puissants médias français répandent en continu le fiel de la peur de l’étranger ; tous les arguments infondés sont bons : « les étrangers coûtent cher à la France », « ce sont tous des délinquants en puissance », « ils font le grand remplacement », etc. Et nul doute que quelques dictatures étrangères – fortes en manipulation – s’immiscent pour saper un peu plus notre démocratie qu’ils haïssent.

Une majorité croissante de Français finissant par y croire, des politiques ont voté une nouvelle loi sur l’immigration dans laquelle chaque catégorie d’étranger – sans exception – voit augmenter la précarité de sa situation en France.

Alors que le moindre collégien français aura coûté en frais scolaires (depuis la maternelle) environ 75 000 € et un bachelier 100 000 € (sans parler des frais médicaux), l’étranger – pour lequel la France n’a rien dépensé pour son enseignement – devra donc attendre des mois pour bénéficier des aides sociales auxquelles n’importe quel citoyen français a droit dans les mêmes conditions !

Tous les rapports sérieux sur l’immigration démontrent qu’aucune vague migratoire ne submerge la France[1] !

Quelle duplicité de la part de députés et de sénateurs qui, hier, rendaient hommage aux travailleurs de seconde ligne du COVID (dont beaucoup d’origine étrangère), … et continuent de fréquenter des restaurants (dont les cuisines ne tournent que grâce à des travailleurs étrangers), des hôpitaux (qui sans cette manne seraient complètement en panne). Combien de chantiers de construction ne pourraient sortir à temps dans leurs circonscriptions sans la main-d’œuvre étrangère ? N’ont-ils jamais pris le RER ou le métro tôt le matin ?

Cette nouvelle loi introduit dans le droit français les prémices du projet politique de la préférence nationale des extrêmes droites ; des mesures encore bien fades et tièdes selon leurs dires…

Qu’adviendra-t-il alors du renouvellement des cartes de séjour des Syriens si, en 2027, le nouveau locataire du Palais de l’Elysée est la courtisane du maître du Kremlin et de son grand ami le boucher de Damas ? La Syrie sera-t-elle alors considérée par cette administration comme un « pays sûr » ? Combien de préfets, dont le pouvoir discrétionnaire en matière de régularisation conforté par cette loi, seront déjà aux ordres de la préférence nationale ? Combien de réfugiés statutaires qui ont connu dans leurs chairs les affres des interrogatoires, de la torture, des terribles prisons syriennes – et échappé aux exécutions – seront raccompagnés par des fonctionnaires français vers leurs bourreaux syriens, autrefois formés par Alois Brunner[2] l’ancien chef nazi du camp d’internement de Drancy, aidé dans ses basses besognes par les amis du cofondateur du parti de cette potentielle prochaine locataire ?

Frédéric ANQUETIL Administrateur de Revivre

[1] France – Principaux développements en matière de migration et de protection internationale – Août 2023 – Eurostat https://www.immigration.interieur.gouv.fr/Info-ressources/Etudes-et- statistiques/Chiffres-cles-sejour-visas-eloignements-asile-acces-a-la- nationalite/Les-chiffres-2022-publication-annuelle-parue-le-22-juin-2023

[2] Hafez el-Assad fût le protecteur d’Alois Brunner, ex-bras droit d’Adolf Eichmann. https://www.francetvinfo.fr/monde/syrie/syrie-comment-le-nazi-alois-brunner-a- forme-le-premier-cercle-du-clan-assad_3058415.html

Riyad Al-Turk, grande figure de la révolution syrienne, est décédé le 1er janvier 2024 à Paris 

Riyad Al-Turk est né à Homs en 1930 dans une famille modeste. Il est d’abord instituteur, puis après des études à la faculté de droit à Damas, il devient avocat en 1957.

Début de l’année 1959, il défie l’appareil policier au cours d’une allocution lors des funérailles de Said Droubi, mort sous la torture. Quelques mois plus tard, il est emprisonné pendant 2 ans et torturé sauvagement.

En 1973, lors de son 4ème Congrès, Riad Al Turk devient le premier secrétaire du Parti Communiste Bureau Politique, organisation rejetée par le mouvement communiste international.

Riad Al Turk est arrêté le 28 octobre 1980, sans inculpation ni jugement. Il sera emprisonné, torturé, dans une cellule individuelle en isolement total durant 18 ans jusqu’à sa libération en mai 1998 ; d’où son pseudonyme de Mandela syrien. 

Il est emprisonné à nouveau le 1er septembre 2001. Après un procès inéquitable, la Cour Suprême de Sûreté de l’Etat le condamne à deux ans et demi de détention.

Après sa libération en novembre 2002, il déclare : « Je remercie vivement tous ceux qui, à l’étranger comme en Syrie, m’ont soutenu, moi et les autres prisonniers politiques et je leur en suis extrêmement reconnaissant. Cela signifie que le thème des droits humains et de la dignité repose sur des valeurs humaines partagées par tous les peuples sur terre… ».

Le 16 octobre 2005, il est un des principaux acteurs de la « Déclaration de Damas » visant à instaurer la démocratie en Syrie.

A partir de mars 2011, il rentre dans la clandestinité, il approuve la témérité de la nouvelle génération. Il sera resté parmi les siens à Douma en Syrie jusqu’au bout de ses forces. 

En juillet 2018, il rejoint la France grâce à une chaine de solidarité permettant de l’exfiltrer de Syrie.

Nous avons rencontré Riyad Al Turk plusieurs fois en Syrie et à Paris lors de débats organisés par Revivre. Son combat pour la démocratie, la justice et la liberté était exemplaire. 

C’est un ami de Revivre qui vient de nous quitter.

Hommage à Haitham NAAL

L’Association Revivre, dont l’objectif dès sa création a été le soutien aux anciens détenus d’opinion syriens a souhaité tout naturellement s’associer à l’hommage qui sera rendu à Haytham Naal dimanche 3 juillet 2022 à 15h30 au Foyer Grenelle, 17 rue de l’Avre, 75015 Paris. Haytham Naal avec Abbas Abas et Salameh Kailey sont les tous premiers anciens prisonniers pour lesquels Revivre s’est mobilisé.

Haytham Naal né en 1950 a été arrêté en 1975. Il avait 25 ans. Torturé, il a été libéré le 11 août 2002 et a ainsi passé 27 ans dans les geôles de la terrible prison de Tadmor. Il a été adopté par Amnesty International comme prisonnier d’opinion. Ses longues années d’incarcération ont eu pour conséquences de multiples séquelles médicales. Dans le journal Le Monde du 13 janvier 2012, l’article « Syrie les 3 naufragés de Tadmor » lui avait été consacré.

Chers amis, la vie volée à Haytham Naal est l’illustration des conséquences de l’Etat de Barbarie mis en place depuis des dizaines d’années par le clan Assad.

Revivre, un film pour en parler

Si pour vivre il faut espérer et travailler, pour revivre il faut entretenir en permanence l’espoir, la volonté et l’énergie.Ce film-document tisse avec proximité, l’entrelacement des fils de vies d’êtres humains divers ; amis malades et anciens détenus d’opinion de Syrie et plus récemment des réfugiés ayant quitté ce pays avec la volonté d’y retourner. C’est aussi l’histoire de quelques syriens et français qui se sont croisés un jour et ont décidé ensemble de frayer un sentier d’espoir nommé « Revivre ».À sa naissance, l’association « Revivre » espérait devenir un cocon de futurs papillons en accueillant de nombreux détenus d’opinion ; naufragés des geôles du régime syrien sous Hafez al-Assad. La torture sauvage faisait de ces êtres humains des chenilles désespérées.Suite à la Révolution Syrienne de mars 2011, « Revivre » se fait un devoir de multiplier ses fils de soie ; il encadre alors les réfugiés syriens qui fuient une Syrie atrocement incendiée par le même régime, celui de l’héritier du trône, Bachar al-Assad .

Ce film-document met en images la clef de voûte de l’association ; le comité du parrainage, des amis et « correspondants » en Syrie, et parmi une trentaine de dossiers traités, quelques malades anciens détenus d’opinion devenus proches. Il montre également l’accueil et le rôle que tient la permanence pour les réfugiés en Syrie.

Un cerf volant lancé par des enfants de Syrie se perd dans le bleu du ciel pour nous réunir au-delà des terres dans notre recherche de liberté et d’espoir…

Elle est encore longue la route, elle est semée d’obstacles et de mines. Au bout, elle est encore bloquée et, par-delà, c’est l’inconnu. Plus tard, après le siège, après la révolution, après la guerre, il y aura toujours ce rêve unique qui nous unit. C’est comme si, munis de pioches, nous formons une longue chaîne humaine qui avance lentement, qui avance sûrement, vers la fin de la route. Béni soit celui qui y parviendra !

— Razan Zeitouneh (Traduit de l’arabe par Rania Samara)