Témoignage de Bassam Al-Ahmed, militant des Droits de l’Homme en Syrie

Militant des Droits de l’Homme en Syrie, Bassam Al Ahmed participera à une réunion publique qui se tiendra à Paris, mardi 27 janvier 2015, à l’invitation de plusieurs organisations des Droits de l’Homme, au côté de 4 autres activistes syriens de premier plan. Le débat sera modéré par le politologue Ziad Majed, auteur de Syrie, la révolution orpheline. Merdi 27 janvier 2015, de 19h30 à 22h. « Le combat des défenseurs des droits de l’Homme en Syrie » : Salle Jean Dame 17, rue Leopold Bellan, 75002 Paris ………………………………………………………………….

Je m’appelle Bassam Al-Ahmed. Je suis originaire de la ville de Qamichli dans le gouvernorat syrien de Hassakeh. En 2005, j’ai commencé à militer et j’ai intégré plusieurs organisations clandestines de revendication des droits démocratiques des Kurdes en Syrie. Au cours des années qui ont précédé la révolution syrienne, j’ai participé à des dizaines de soirées et d’activités avec d’autres militants, essentiellement dans la ville de Damas. Nombre de ces réunions portaient sur la culture de la citoyenneté, la société civile, les droits humains, la Constitution, les minorités et d’autres sujets encore parmi ceux qui étaient débattus dans les couloirs de l’Université de Damas. Notre action dans ces domaines était remarquable et d’une très grande envergure au sein de l’université. Bassam-AL-AHMED   Suite au déclenchement de la révolution en mars 2011, j’ai participé à des activités de la révolution, comme tous les militants et citoyens syriens qui se sont révoltés pour défendre leur liberté et leur dignité. Parmi nos nombreuses activités figuraient la participation aux manifestations pacifiques et l’organisation de conférences sur la non-violence avec plusieurs autres militants et activistes. J’ai ensuite commencé à collaborer avec le Centre syrien pour les Médias et la Liberté d’Expression en janvier 2012. Peu de temps après, en février, le Centre a été victime d’une attaque des services de renseignements de l’Armée de l’air qui ont arrêté toute l’équipe des militants et militantes, avec à sa tête le journaliste Mazen Darwich. Libéré 87 jours plus tard, j’ai repris mes activités et me suis entièrement consacré au travail avec le Centre de Documentation des Violations en Syrie (VDC), dirigé par l’éminente avocate des Droits de l’Homme Razan Zaitouneh.

Le Centre de Documentation des Violations joue un rôle essentiel dans le processus de documentation des violations des Droits humains en Syrie depuis le début de la révolution. Il est parvenu, jusqu’à ce jour, à documenter des dizaines de milliers de cas de meurtres et de mauvais traitements infligés à des détenus, et à collecter les noms de milliers de victimes de disparitions forcées. Nous avons également publié des dizaines de rapports, dont le premier rapport documenté sur le massacre à l’arme chimique de la Ghouta de Damas en août 2013, le premier rapport sur les atrocités commises au sein de l’Unité 215 des services de la Sécurité militaire ou encore sur les fosses communes où sont ensevelis les prisonniers.

Le Centre compte aujourd’hui plus d’une trentaine de militants et militantes compétents et expérimentés en matière de documentation des violations des Droits humains, à la fois du fait de l’ampleur de notre travail au quotidien depuis près de 4 années, et grâce aux nombreuses sessions de formation auxquelles ils ont pu participer avec le soutien des organisations internationales des Droits de l’Homme.

A l’instar des autres jeunes organisations de la société civile et des organisations syriennes de défense des Droits humains, notre Centre a dû faire face à quantité de défis et difficultés au cours des premiers mois de la révolution, principalement en lien avec la situation sécuritaire. Un grand nombre de militants qui collaboraient ou travaillaient avec le Centre ont été arrêtés. Et ces difficultés n’ont pas cessé après que certains groupes armés opposés au gouvernement aient pris le contrôle de certaines régions dans lesquelles nos militants sont actifs. Le 9 décembre 2012, des membres d’une milice anti-gouvernementale ont attaqué le bâtiment principal du Centre de Documentation des Violations en Syrie de la ville de Douma, dans la campagne de Damas, et enlevé la directrice du Centre, la militante pour les Droits humains et avocate Razan Zaitouneh, ainsi que trois de ses collègues : Samira Al-Khalil, Wael Hamada – l’époux de Razan Zaitouneh, et l’avocat Nazim Al-Hamadi. A ce jour, ils figurent parmi les nombreuses victimes de disparitions forcées dans mon pays.

Les organisations de la société civile syrienne ont déployé d’incroyables efforts pour obtenir la vérité sur les événements qui affectent la Syrie, et les défenseurs des Droits humains ont joué un rôle de premier plan à cet égard. Ils ont, pour cela, enduré de nombreuses souffrances, fait la terrible expérience de la détention où parfois ils ont laissé la vie. Notre collègue le Dr. Ayham Mostafa Ghazzoul, qui militait avec nous, a ainsi succombé sous la torture alors qu’il se trouvait aux mains des services de sécurité. C’est le cas de dizaines d’autres activistes, si nombreux que nous ne pouvons tous les nommer ici. Nous avons cependant une pensée toute particulière pour Mazen Darwich, directeur du Centre syrien pour les Médias et la Liberté d’Expression (SCM), le blogueur Hussein Gharir et l’activiste Hani Zitani, avec qui j’ai été arrêté en février 2012 et qui sont toujours détenus pour leur combat pacifique en faveur des libertés.

Malgré tous les défis auxquels nous sommes confrontés, nous avons conscience que la société civile syrienne est encore jeune et doit continuer à se construire. Nous avons besoin du soutien des organisations internationales dont l’expérience est avérée dans ce domaine, mais plus encore c’est de la solidarité et du soutien de tous dont nous avons besoin pour cultiver l’espoir et nous aider à tracer un chemin hors de l’obscurité pour la Syrie.

 

Source : Un œil sur la Syrie, 20 janvier 2015 http://syrie.blog.lemonde.fr/2015/01/20/temoignage-de-bassam-al-ahmed-militant-des-droits-de-lhomme-en-syrie/

Radwan, rescapé syrien du « Blue Sky », et son ange gardien italien Tommaso

Par  Maryline Baumard 

Le Monde le 5 janvier 2015  

On l’appellera Radwan. Le 31 décembre à 3 h 30 du matin, cet homme de moins de 40 ans, teint hâlé, visage exténué, est descendu du cargo Blue Sky à Gallipoli, dans le sud de l’Italie, avec son épouse enceinte. Depuis, le migrant Syrien s’est reposé dans une école, un centre d’hébergement avant de prendre le train pour remonter l’Europe. En trois jours, il a quitté les frontières de l’Italie.

Aujourd’hui, Radwan continue sa route vers le nord avec, en Italie, un ange gardien du nom de Tommaso Tomaiuolo qui veille sur lui. L’amitié entre ces deux hommes a commencé le 31 décembre au travers d’une grille de cour d’école. Celle de l’établissement de Gallipoli où Radwan avait été emmené pour se reposer après que son cargo – abandonné par son capitaine – eut été ramené dans le port.

Comme ses voisins et ses amis, Tommaso s’apprêtait à fêter tranquillement le réveillon de la Saint-Sylvestre dans les Pouilles quand le Blue Sky a fait irruption dans sa vie. Depuis l’arrivée de ce cargo et de ses 768 migrants, dans le port de sa petite ville, le jeune quadragénaire est comme happé dans un tourbillon fou. « Je n’oublierai jamais les rencontres que j’ai faites depuis le 31 décembre, ni les regards. Ils ont changé mon regard sur la vie », raconte ce créateur de sites Internet qui travaille pour une petite société italienne et habite à Alezio, à 5 kilomètres de Gallipoli, dans les Pouilles.

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Photo : Le « Blue Sky », dans le port Gallipoli. | DR/Tommaso Tomaiuolo

«  Je voulais être utile »

Dès qu’il apprend que le navire vogue sans capitaine, en direction des côtes de son pays, il twitte heure par heure le sauvetage et alimente son compte Facebook. Dès les premières heures du jour, levé tôt, il file au port.

« Un navire vide c’est bien… Mais ce n’était pas mon but ! , raconte-t-il, je voulais être utile. » Tommaso pressent que la couche de rouille du cargo cache bien des drames humains. Comme il ne décroche pas des radios locales, il apprend tout de suite dans quelles écoles de la ville ont été installés les migrants, afin qu’ils puissent se reposer. « Le maire a eu six heures pour réagir et trouver des solutions. Juste le temps du sauvetage du navire », ajoute Tommaso.

L’homme file vers les centres ouverts, comme beaucoup d’autres citoyens de cette zone pauvre, touchée de plein fouet par le chômage, mais prêts là à toutes les générosités. « Durant la soirée du 30 décembre, entre 21 heures – heure à laquelle on a appris que le bateau fantôme se dirigeait vers nos côtes – et son arrivée, 70 bénévoles de la protection civile se sont mobilisés, aux côtés de ceux de la Croix Rouge et de beaucoup de simples citoyens comme moi », explique-t-il.

Quand Tommaso Tomaiuolo arrive dans une des écoles d’accueil, des hommes sont là derrière les grilles. « A un premier, je demande ce dont il a besoin, il me montre timidement mon téléphone mobile que je tenais à la main et comme je lui passe, il semble douter qu’il puisse vraiment appeler à l’étranger. » L’homme joint la Turquie, parle quelques minutes et rend à Tommaso son smartphone « avec un sourire que je n’oublierai jamais ». Tous deux fument ensemble une cigarette. Tommaso lui pose quelques questions.

Quand l’ingénieur revient à l’école, l’après-midi, il trouve un autre Syrien à la place du premier. C’est Radwan. Son épouse se repose de ce voyage dans des conditions effroyables.

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Photo :  Les cales du Blue Sky durant la traversée de la Méditerranée. | DR/Tommaso Tomaiulo

Les deux hommes sympathisent, partagent quelques cigarettes. « Radwan a quitté la Syrie, il y a un an et vit depuis en Turquie. Là, il a dû une nouvelle fois refaire ses bagages, parce qu’en Turquie il n’a trouvé aucun travail », rappelle l’Italien. Tommaso Tomaiuolo, qui ne veut pas se mettre en scène, reconnaît du bout des lèvres qu’il a aidé financièrement cet homme à partir vers le nord et à charger son téléphone portable. Il lui a aussi donné deux livres et deux crayons. Radwan n’est pas « pauvre », mais il vient tout de même de débourser 14 000 euros pour payer son passage et celui de son épouse et il ne sait pas quand son périple s’arrêtera…

Pour les épisodes précédents, les photos prises par l’Italien parlent d’elles-mêmes. « Comme nous n’avions pas de connexion Internet, j’ai photographié avec mon téléphone l’intérieur de la cale du Blue Sky. Et franchement, cela m’a bouleversé de voir comment ces gens avaient été traités », raconte Tommaso.

« Rester en Syrie pour y mourir ou partir »

La discussion s’installe entre les deux hommes et Radwan raconte comment il lui a fallu prendre un petit bateau de pêche pour rejoindre le cargo qui mouillait dans les eaux internationales au large du port turc de Mersin. « Comme il avait un très bon anglais, pour avoir vécu quelque temps en Grande-Bretagne, nous avons pu parler longuement. Pour Radwan, la question syrienne n’est pas un problème que doit gérer l’Italie ou l’Europe, mais c’est bien un sujet qui doit être pris en charge par les Nations unies. Je n’avais que deux options, m’a dit Radwan : rester en Syrie pour y mourir ou partir », rapporte l’Italien.

La discussion entre Radwan et Tommaso a été stoppée, ce 31 décembre par les cris de deux femmes. Toutes deux pleuraient l’arrestation par la police italienne de leur fils et frère Rani Ahmad Sarkas, soupçonné par les autorités d’être un des passeurs et d’avoir piloté le cargo.

Dimanche 4 janvier, le quotidien italien La Republica racontait son audition par la police, traduite par l’AFP. « Ils m’ont promis 15 000 dollars [12 500 euros] et la possibilité de faire venir toute ma famille », a-t-il expliqué aux inspecteurs. Tommaso confirme que les deux femmes lui ont expliqué que treize autres membres de la famille se trouvaient sur le Blue Sky.

Rani Ahmad Sarkas est un Syrien âgé de 36 ans. Des extraits de son audition, reproduits par le journal italien permettent de comprendre comment il a pris la barre du navire. « Je suis arrivé en Turquie par avion depuis le Liban où j’étais réfugié. Là, j’ai été contacté par une connaissance qui savait que j’étais capitaine de navire », ajoute-t-il. Les deux hommes se rencontrent à Istanbul, font affaire. Rani Sarkas embarque alors avec trois autres hommes sur le Blue Sky, battant pavillon moldave, à destination de Mersin, port turc situé près la côte syrienne.

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Photo : Sarkas Rani, capitaine du Blue Sky. | Facebook/ Rani Sarkas

Le cargo reste deux jours, ancré au large, dans l’attente de sa « cargaison ». Le troisième jour, un bateau a emmené un premier groupe de 30 personnes sur le Blue Sky. Pendant quatre jours, la noria a continué et, le 25 décembre, ils ont largué les amarres avec 768 passagers à bord. « J’ai personnellement tracé la route pour l’Italie », a raconté le jeune homme aux enquêteurs. Après s’être abrité près des côtes grecques, pour éviter la tempête, il a repris sa route vers le sud de l’Italie. Il a ensuite abandonné la passerelle pour se réfugier dans la cale après avoir bloqué la barre et le moteur. Le navire a continué sa route à environ six nœuds (11 km/h) vers la terre. Sans intervention de la marine italienne, il se serait fracassé contre les rochers avec sa cargaison humaine.

« La mère et la sœur du capitaine m’ont demandé si je pouvais les aider à trouver un avocat, mais aucune des deux n’a voulu que je les filme. Elles avaient peur de la mafia turque si un jour, elles retournent en Turquie », regrette Tommaso. Avant qu’il ne soit question de cela, les migrants sont montés dans un bus pour être mieux installés ailleurs en Italie. L’école a refermé ses portes pour se préparer au retour des élèves italiens ce lundi.

« Le 31, j’ai surtout surveillé ma messagerie pour voir si Radwan m’avait écrit. J’ai eu le plaisir de découvrir que oui », ajoute-t-il.

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Photo : Echange de SMS entre Tommaso et Radwan. | DR

Le 1er janvier, Tommaso Tomaiuolo a refait le tour des écoles. La dernière était en train d’être évacuée. Gallipoli refermait la parenthèse du Blue Sky« Pour moi, cela aura vraiment été une Saint-Sylvestre riche en tragédie et en émotion. Un de ces moments qui changent un regard sur la vie. Je n’oublierai jamais comment ma ville a su prendre soin des migrants. J’aime me rappeler cette photo du maire qui fait une partie de volley-ball avec quelques-uns d’entre eux. La vie est rude dans l’Italie du sud, très touchée par la crise, mais elle est belle. Nous avons des valeurs », conclut l’Italien avant de repartir à son quotidien d’informaticien.

*Initialement, Tommaso Tomaiuolo ne souhaitait pas apparaître dans ce récit. « Je veux juste que cette tragédie soit connue. Je n’ai fait que ce que d’autres citoyens comme moi ont aussi fait pour ces gens. Par humanité », ajoute-t-il à l’issue d’un long entretien téléphonique. Convaincu que le lecteur de cet article a envie de le connaître, il a finalement accepté que son nom et ses actions figurent dans le récit de ce moment que dit-il, il « n’oubliera jamais ».
Vidéo (Le Monde & Dalymotion)

« Les migrants du blue SkyM transférés depuis l’école de Galipoli »

http://www.dailymotion.com/video/x2e1vfr_les-migrants-du-blueskym-transferes-depuis-l-ecole-de-galipoli_news

 

Source: Le Monde. 05.01.2015 

http://www.lemonde.fr/immigration-et-diversite/article/2015/01/05/radwan-rescape-syrien-du-blue-sky-et-son-ange-gardien-italien-tommaso_4549556_1654200.html

 

 

 

 

Communiqué « Les cargos de la honte »

Communiqué du 2 janvier 2015

 

 « Les cargos de la honte »

Préparons nous à accueillir dignement de nombreux réfugiés syriens.

 En quelques 48 heures, deux cargos chargés de centaines de réfugiés pour la plupart syriens ont failli, abandonnés par leur équipage à la solde de passeurs, se fracasser sur les côtes italiennes. Il s’en est fallu de peu qu’une nouvelle catastrophe humanitaire s’additionne aux 3 400 migrants ayant perdu la vie en 2014 en Méditerranée.

Pour l’association REVIVRE, ce nouvel épisode n’est pas pour la surprendre.  Les 4 millions de réfugiés aux frontières de la Syrie vivant dans des conditions précaires et n’ayant aucune perspective de retour dans un pays détruit et soumis à la barbarie, ne vont cesser de tenter de fuir vers d’autres pays et, tout particulièrement, vers l’Europe.

Depuis les 2 arrivées de quelques 400 réfugiés syriens en avril et en juillet 2014 à Saint-Ouen, nous ne cessons d’attirer l’attention des différentes administrations sur la nécessité d’anticiper les conséquences d’une immigration importante de réfugiés syriens sur notre territoire.

L’Italie ne pourra, elle seule, garder sur son territoire tous ces migrants. Beaucoup vont se retrouver en France, soit pour transiter, soit pour y demander l’asile.

Dès maintenant, des dispositifs de protection et d’hébergement d’urgence doivent être élaborés, sachant que nous sommes en période hivernale et que de nombreux enfants accompagnent ces familles.

Ces derniers jours, nous avons pu constater qu’à l’occasion de la mise en place du plan « Grands froids » et des mesures destinées aux naufragés de la neige sur les autoroutes des vacances des solutions existent lorsque la volonté est au rendez-vous.

Les devoirs de solidarité et de respect du droit d’asile envers ces victimes d’un conflit aussi monstrueux sont indispensables.

Contact presse :

Contact.revivre@gmail.com

Tel : 06 87 56 94 53

Communiqué Revivre du 2 janvier 2015

Naufrage de migrants : une Syrienne dit avoir survécu pour « sauver des enfants »

Publié le 17/09/2014

« Je voulais sauver les enfants, c’est pourquoi je suis restée en vie »: grâce à une chambre à air, Doaa, une Syrienne de 19 ans, a échappé au naufrage qui a fait des centaines de victimes parmi des migrants en Méditerranée le 10 septembre, sauvant aussi la vie d’un bébé que lui a confié sa mère désespérée avant de mourir.

Doaa Al Zamel et Mohamed Raad, un Palestinien de 23 ans, ont raconté mercredi leur calvaire à l’AFP, dans le port crétois de la Canée, où ils ont été amenés avec deux autres Palestiniens, un Egyptien et la fillette d’origine syrienne par un porte-conteneur qui les a récupérés.

Ils font partie de la dizaine de personnes, sur quelque 500, embarquées le 6 septembre en Egypte avec l’espoir de gagner l’Italie.

Tous deux, ainsi qu’un autre Palestinien qui a préféré ne pas s’exprimer, Abdelmazid Alhila, sont apparus en bonne santé physique mercredi, à l’exception de marques de brûlures solaires.

Mercredi dernier, pourtant, en pleine mer, et apparemment parce qu’ils refusaient de se laisser transférer dans une embarcation bien trop petite pour eux tous, les migrants auraient été victimes de leurs passeurs, qui ont coulé leur bateau, selon des témoignages recueillis par l’OIM (Organisation internationale pour les migrations).

Doaa et Mohamed sont plus évasifs : Il dit « n’avoir pas vu le bateau qui nous a percutés ». « J’étais sur le pont inférieur et je ne voyais rien. J’ai entendu crier et hurler. Cela n’a pas duré longtemps, le bateau n’a pas mis une minute à couler ».

Doaa pour sa part témoigne qu’un « bateau de pêche », dont elle ne dit pas par qui il était occupé, « nous a demandé de nous arrêter » et les occupants ont commencé à « lancer des objets en métal et en bois en nous insultant », mais comme le capitaine refusait de s’arrêter, « ils nous ont tamponnés jusqu’à ce que le bateau coule, ils nous ont regardés et ils sont partis ». D’après leurs traits, elle suppose que les agresseurs étaient « égyptiens ou libyens ».

— En Italie pour se marier —

« La collision s’est produite vers midi, et le bateau en métal, « pas en très bon état » selon elle, n’a eu aucune chance. « Un grand-père m’a suppliée de garder sa petite-fille d’un an », puis « une mère m’a demandé de garder sa fille de deux ans pour qu’elle puisse s’occuper de son fils de 6 ». Un autre garçonnet lui a été confié pendant quelque temps par sa tante, avant d’être repris par celle-ci.

« Nous sommes restés en groupe et nous avons prié Dieu pour être sauvés », dit-elle.

Mais tous ceux qui avaient demandé son aide sont morts sous ses yeux, le bébé d’un an dans ses bras juste avant qu’elle ne soit elle-même sauvée. Elle a pourtant pu sauver la vie de la fillette de deux ans, Syrienne selon elle, qui semblait hors de danger mercredi soir à l’hôpital d’Héraklion.

Dans le naufrage, Doaa, triste mais calme en racontant ce cauchemar, a aussi vu mourir son fiancé. « C’est lui qui avait trouvé les passeurs ». « Ils devaient nous amener en Italie pour que nous puissions nous y marier. Maintenant, je n’ai plus de raison d’y aller », soupire-t-elle, disant « n’être restée en vie que pour sauver les enfants ».

Mohamed se rappelle qu’après le naufrage du bateau, « 80 à 90 personnes » se sont retrouvées au milieu des flots à lutter pour leur survie. « Les femmes et les enfants avaient soif, les hommes ont uriné dans des bouteilles pour qu’ils boivent ». Puis, « nous sommes restés deux nuits et trois jours dans le froid, la soif, la peur », et « le troisième jour, les gens ont commencé à devenir fous », raconte le jeune barbier, qui a eu la chance d’avoir trouvé un gilet de sauvetage.

Dans sa somnolence, il s’imagine à un moment dans un hôtel, « et j’ai commencé à enlever mon gilet de sauvetage, mais j’ai soudain réalisé que j’étais en train de couler et je l’ai remis ».

Il revoit l’image de « certains qui avaient leurs enfants avec eux, et quand ils mouraient ils les laissaient juste glisser dans l’eau… »

Les disparus étaient Syriens, Palestiniens, Egyptiens ou Soudanais. Comme beaucoup, Mohamed était parti de Gaza, en quête d’un peu de paix. « Depuis que je suis né, je n’ai jamais vécu une seule journée heureuse. Toujours la tyrannie, la guerre, le chômage et ne pas savoir quand nous serons tués »…

Nota:  Doaa Al Zamel  a été primée le vendredi 19 décembre 2014, par l’Académie d’Athènes pour son action héroïque

Doaa Al Zamel

Source de l’article :

http://www.ladepeche.fr/article/2014/09/17/1953584-naufrage-migrants-syrienne-dit-avoir-survecu-sauver-enfants.html

Torture en Syrie : un réfugié témoigne

Par Olivier Brégeard

Arrêté sans preuve après avoir participé à des manifestations contre Bachar el-Assad, un jeune membre de la bourgeoisie de Damas a passé plusieurs semaines dans l’enfer des geôles du régime. De passage en Alsace au terme d’une odyssée dantesque, il s’est confié à nous. Un récit déconseillé aux âmes sensibles.

 

Lire la suite….

http://www.lalsace.fr/actualite/2014/12/16/torture-en-syrie-un-refugie-temoigne

 

Photo: Mulhouse, le 4 décembre 2014 : une partie de la famille de B. résidant encore en Syrie, nous avons préservé son anonymat et gommé certains éléments de son récit qui auraient pu permettre de l’identifier. Photo  L’Alsace/

un réfugié témoigne

Où sont passés les 48 millions de dollars promis aux Syriens par l’Union Européenne ?

Au milieu de la campagne pour la régularisation des réfugiés, une autre information a défrayé la chronique : le Programme alimentaire mondial ( PAM) a suspendu les bons alimentaires à 1,7 million de réfugiés en raison d’un manque de financement des gouvernements. Grace a la pression médiatique, les paiements ont fini par être faits à la dernière minute et le programme a été renouvelé pour le moment. Mais le financement de cette crise des réfugiés est loin d’être résolu.
Le PAM a indiqué que la raison de la suspension des bons de nourriture était due aux « promesses non tenues » de certains gouvernements. Nous avons donc commencé à creuser dans les chiffres officiels de l’ONU, et nous avons trouvé un grand vide inexpliqué. Avec seulement 21 jours laissés en 2014, la Commission européenne a omis de payer 48 000 000 dollars qui avaient été promis.
L’aide financière est urgente, les rations alimentaires sont minimes, et les réfugiés manquent de couvertures et de tentes. Il y a seulement 2 semaines, deux bébés sont morts de froid dans l’un des camps du Liban. Et il va faire de plus en plus froid.
Lorsque nous avons demandé à la Commission européenne vendredi dernier des détails à propos de ce vide de financement énorme, ils ont répondus en disant que des vérifications au plus haut niveau vont être faites et qu’ils reviendront vers nous. Cela fait maintenant cinq jours et toujours aucune explication.
C’est exactement sur ce point que la pression du public peut aider. Ce n’est pas une question qui devrait être archivée au fond de la boîte de réception d’un bureaucrate. C’est un financement essentiel pour la Syrie.
Appelons donc aujourd’hui la Commission européenne à payer immédiatement les 48 000 000 de dollars promis. Cet argent est dû aux personnes les plus vulnérables du monde. Faisons en sorte qu’elles l’obtiennent sans plus tarder.
Partagez, après avoir ajouté votre nom à notre appel:

https://thesyriacampaign.org/en/actions/promises-to-refugees

 

Accueillez les réfugiés syriens, disent les agences humanitaires aux pays riches:
http://www.theguardian.com/world/2014/dec/08/take-in-syrian-refugees-rich-countries

 

Passons de la déception à l’espoir

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Texte en français : Via page FB de Wladimir Glasman

https://www.facebook.com/profile.php?id=100005876497366&fref=tl_fr_box&pnref=lhc.friends

réfugiée syrienne

 

Syrie: battus, pendus, recouverts de cafards, le quotidien des détenus du régime

Pendant deux ans, les journées de Mohsen al-Masri ont été rythmées par les tortures. Suspendu au plafond, recouvert de cafards, battu encore et encore… Il a survécu et peut aujourd’hui témoigner, pour les 12.000 personnes mortes dans les prisons du régime syrien.

Son visage rond désormais émacié, Mohsen, un nom d’emprunt, raconte les sévices et humiliations depuis son exil turc. «Chaque fois que l’on était transféré d’un centre à un autre, on avait le droit à une ‘fête de bienvenue’, (les gardes) nous battaient brutalement, avec des bâtons».

le quotidien des détenus du régime

Mohsen a été pendu par les poignets des heures durant, ses orteils frôlant à peine le sol. Parfois, ses gardes glissaient des cafards sous ses vêtements, puis l’aspergeaient d’insecticide.

La torture pouvait aussi se faire psychologique. «Ils insultaient ma femme, me disaient qu’ils allaient aller chez moi et la violer».

Depuis le début de la guerre, en mars 2011, quelque 200.000 personnes ont été emprisonnées en Syrie, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). 12.000 ont péri en détention.

La plupart des détenus passent d’abord par les centres des services de renseignements, privés d’eau, de nourriture, de médicaments. Mohsen faisait 100 kg lors de son arrestation, il en pesait moins de 50 à sa sortie.

«Pour nous, vous n’êtes rien», a un jour lancé un de ses tortionnaires à Mohammad Samaan — un pseudonyme –, arrêté et emprisonné à deux reprises. «Nous torturons les gens parce que nous sommes sadiques. Nous aimons ça».

«Il m’a électrocuté et m’a dit d’écrire tout ce que je savais. Il a tout fait pour essayer de me faire craquer», explique ce militant pacifiste de 33 ans, originaire de Damas.

«J’ai survécu à un cauchemar. Rien (…) ne m’aurait préparé à l’horreur de la détention», raconte-t-il, se rappelant avoir lu, peu avant le début de la révolution, «1984» de George Orwell, qui décrit la vie sous un régime totalitaire. «Quand j’ai été emprisonné à mon tour, j’ai découvert qu’un tel monde existait, et que c’était en Syrie».

«Aujourd’hui, les souvenirs me hantent chaque jour, quand je mange, quand je dors», raconte-t-il d’une voix calme, tirant sur sa cigarette à Beyrouth, où il a trouvé refuge.

– Simulacres de procès –

Comme la plupart des détenus, MM. Samaan et Masri ont été transférés, après leur passage dans les bureaux des services de renseignements, dans les tristement célèbres prisons d’Adra et de Seydneya, après un simulacre de procès.

M. Masri, lui aussi militant pacifiste, a été jugé par un tribunal militaire. Et le procès de M. Samaan était, selon ses propres mots, une «farce». «Tous les juges en Syrie ne font que suivre les ordres des forces de sécurité».

Un constat partagé par un éminent avocat syrien spécialisé dans les droits de l’Homme. «Le régime ne respecte pas ses propres lois quand il s’agit des prisonniers», affirme-t-il sous le couvert de l’anonymat.

«Il y a quatre agences de sécurité en Syrie, et chacune est prête à tout pour montrer qu’elle est plus violente que les autres», ajoute l’avocat. Et de décrire un maillage sous-terrain immense de prisons et de centres de détention secrets.

«Rien qu’à Damas, il y a 30 ou 40 centres d’interrogation des services de sécurité et un nombre inconnu de lieux de détention secrets». Seuls les détenus dans les prisons officielles ont le droit à des visites.

En outre, plusieurs détenus sont emprisonnés comme «otages» et utilisés comme moyen de pression sur la personne voulue jusqu’à ce qu’elle se rende.

Le président Bachar al-Assad a bien accordé une amnistie à des milliers de personnes en juin, mais seule une poignée des prisonniers de conscience ont été libérés.

Pour la militante des droits de l’Homme Sema Nassar, le régime refuse de libérer les militants pacifistes qui ont joué un rôle essentiel aux commencements de la révolte, en mars 2011, par crainte de l’influence qu’ils pourraient avoir une fois libérés.

Le conflit syrien, débuté par des manifestations brutalement réprimées par le régime Assad, est devenu depuis une guerre complexe, où s’affrontent rebelles, groupes jihadistes et armée. Il a fait 200.000 morts.

La plupart des meneurs du soulèvement pacifique sont aujourd’hui morts, en prison ou réfugiés à l’étranger, selon plusieurs militants.

AFP

Source : Le quotidien « Libération »

http://www.liberation.fr/monde/2014/12/12/syrie-battus-pendus-recouverts-de-cafards-le-quotidien-des-detenus-du-regime_1162151