SOIRÉE ANNIVERSAIRE

JEUDI 24 OCTOBRE 2024

Fil conducteur de la soirée par :

Leyla-Claire RABIH, metteure en scène et traductrice, a été nommée directrice de l’ENSATT en mars 2024. Après des études littéraires, elle a été formée au conservatoire supérieur Ernst Busch de Berlin. Elle travaille pendant dix ans en Allemagne entre le théâtre subventionné et la scène indépendante, privilégiant le répertoire contemporain et les jeunes auteurs. À l’international, elle collabore notamment avec l’institut français, et a déjà mis en scène à l’ENSATT en 2023 une ouverture avec le Market Lab de Johannesburg.

TABLES RONDES

L’expérience carcérale en Syrie

Moustafa KHALIFÉ est un écrivain primé et un topographe syrien né en 1948, ancien détenu d’opinion célèbre et auteur du livre La Coquille, roman inspiré de son expérience carcérale sous le régime de Hafez el-Assad, notamment à Palmyre, une des pires prisons construite par le régime syrien.

Najah ALBUKAI est un graveur et dessinateur syrien né à Homs en 1970. Il est connu notamment pour ses dessins de corps suppliciés et de méthodes de torture, subies et observées lors de ses périodes d’emprisonnement dans les prisons du régime syrien.

Garance LE CAISNE est une journaliste et autrice française. Son livre documentaire Opération César, sur les atrocités commises dans les prisons du régime de Bachar el- Assad en Syrie, publié en 2015, a acquis une reconnaissance internationale. Elle a reçu le Prix de littérature Geschwister Scholl en Allemagne en 2016. Elle a également co- réalisé avec Stéphane Malterre en 2021, un documentaire intitulé Les Âmes perdues sur les procédures judiciaires qui tentent de donner justice aux détenus syriens et à leurs familles.

Traduction arabe/français : Randa BAAS

Revivre en action

Clémence BECTARTE, avocate au Barreau de Paris, est spécialisée en droit pénal, droit international des droits de l’Homme et droit international humanitaire. Depuis 2008, elle coordonne le Groupe d’action judiciaire de la FIDH, un réseau de magistrats, juristes, avocats et professeurs de droit issus des organisations membres de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH), qui a pour mandat d’accompagner les victimes des crimes internationaux les plus graves que sont le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et la torture, devant les juridictions nationales et internationales.

Jihad YAGIZI est un journaliste et analyste syrien, fondateur et rédacteur en chef de The Syria Report, un bulletin en ligne sur l’économie syrienne, ainsi que cofondateur de The Syrian Observer, qui traduit des articles de la presse syrienne en anglais. Jihad a publié de nombreux travaux sur l’économie de guerre en Syrie, la décentralisation, l’exploitation de la destruction des biens par le régime, l’impact des sanctions sur l’économie syrienne et les conséquences de l’effondrement de l’économie libanaise.

ARTISTES

Naïssam JALAL

Flûtiste vertigineuse et compositrice prolifique, Naïssam Jalal se produit avec ses différentes formations, dévoilant un univers musical personnel et vibrant qui, tant sur le fond que sur la forme, redonne tout son sens au mot liberté. Lauréate des Victoires du Jazz 2019, nominée aux Victoires du Jazz 2018 et 2021, « Coup de Cœur 2017′′ de l’Académie Charles Cros, Groupe Révélation Citizen Jazz 2017, Lauréate du Prix des Musique D’ICI- Diaspora Music Awards 2020.

Mohanad ALJARAMANI

Oudiste, chanteur et percussionniste, né en 1979 à Sweida (Syrie), il est diplômé du Conservatoire national supérieur de musique de Damas en 2008 et co-fonde le trio Bab Assalam (la porte de la paix) avec Raphaël Vuillard et Khaled Aljaramani, en 2007. Il appartient à la troupe du Conservatoire national supérieur et à celle de l’Opéra de Damas de 2005 à 2011. Il se produit en concerts dans le monde arabe, en Afrique et en Europe, notamment au Mucem et à l’opéra de Marseille, à l’Institut du monde arabe à Paris et collabore avec des musiciens comme le chanteur compositeur Abed Azrié.

Yara AL HASBANI

Née en 1993 à Damas en Syrie, Yara Al Hasbani étudie la danse à l’Institut supérieur d’art dramatique de Damas. Elle est lauréate du dispositif FoRTE de la Région Île-de-France, et de la Caisse des dépôts et de la SACD et AFAC pour sa première création de groupe Elham sur la confiscation du corps des femmes dans le monde.

M 13 (METRO 13)

À son arrivée à Paris, la chanteuse Samara JAD forme le groupe Métro 13 avec le musicien et compositeur Fawaz BAKER, en clin d’œil à cette ligne liant les destinations des différents membres.
En musique, leurs âmes se mêlent dans un répertoire où les expériences résonnent avec douceur et amertume à travers le oud (Fawaz BAKER), le qanun (Nidhal JAUOA), le violon (Sameh KATALAN), les percussions (Samir HOMSI), et bien sûr la voix de Samara JAD.

FILM – Revivre, 20 ans après

Réalisation : Mahmoud HAMOUD avec Abdulrazak ALJUMAA et Emilie GLASMAN

Montage : Ahmad MUADDAMANI

Mixage son : Rita MAHMOUD

Traduction : Abdulrazak ALJUMAA

Interviews (dans l’ordre d’apparition) :

  • Assem HAMSHO – Photographe et activiste syrien
  • Michel DUCLOS – Ancien Ambassadeur de France en Syrie de 2006 à 2009
  • Aïcha ARNAOUT – Poétesse et activiste franco-syrienne
  • Pascale BRICE – Ancien Directeur de l’OFPRA de 2012 à 2018
  • Michel MORZIÈRE – Membre fondateur et président d’honneur de l’Association

Newsletter 22 – Edito

En 2004, en créant Revivre nous ne pensions pas que, 20 ans plus tard, le peuple syrien serait ainsi martyrisé, et la Syrie fracturée livrée à la dictature d’un clan, au trafic de drogue, à l’obscurantisme et à l’intolérance.

Au cours de ces 20 années passées, Revivre a pu travailler, collaborer, échanger avec des syriens et syriennes – aujourd’hui disparus – dont l’humanité et le combat font l’honneur de ce pays. Nous pensons tout particulièrement à Riyad Turk, Razan Zetouney, Fadwa Souleyman, Salameh  Kailéh, Abbas Abbas, Dr Al Rayer, Michel Kilo.

Nous pensons à Imad Chiha, à Farez Mourad emprisonnés pendant 30 ans, et à Haissam Nahal pendant 28 ans.

Nous pensons à l’immense cohorte d’anonymes – femmes, hommes et enfants – broyés depuis 1970 par le régime – de père en fils – et ses affidés. 

Nous pensons à ceux qui furent les premiers artisans de Revivre : Wladimir Glasman et son épouse Vivianne, présidente de Revivre, Sakher Farzat notre premier président.

Nous pensons à ces femmes activistes, anciennes prisonnières du régime qui perpétuent aujourd’hui leur engagement dans le « mouvement du 26 novembre ».

Comment ne pas associer à cette commémoration, ces milliers de femmes, hommes et enfants, réfugiés en France dans la douleur de l’exil. Depuis 12 ans, nombreux ont été accueillis à notre permanence.

Comment ne pas se révolter pour toutes ces familles fracturées qui depuis des mois, voire des années, ne parviennent à obtenir de nos autorités consulaires des visas pour enfin se rassembler et enfin revivre.

Les rapports de la Commission d’enquête indépendante et internationale de l’ONU sur la Syrie mettent l’accent sur la souffrance des civils qui subissent depuis plus d’une décennie, crimes, bombardements, transferts de population, disparitions forcées et privations de liberté.

Jamais nous n’accepterons que les bourreaux puissent être réhabilités et soient un jour fréquentables par nos dirigeants.

Par nos actions de plaidoyer pour la Syrie martyrisée, c’est notre propre Humanité que nous préservons.

Merci à vous tous, bénévoles, adhérents, donateurs. Sans vous rien ne serait possible.

Merci à vous tous, journalistes, avocats, chercheurs, juristes, activistes, qui contribuez à documenter et à refuser l’impunité des bourreaux.

Les graines de la Démocratie et de la Justice ont été semées en Syrie. Revivre, à la mesure de ses moyens, devra avoir la ténacité de les faire fructifier.

Pour une Syrie Libre et Démocratique, ensemble, nous ne lâcherons rien.

Michel MORZIERE

Président d’honneur de Revivre

Newsletter 21 – Edito

Normaliser les violations des droits humains, jamais !

Au moment où l’Iran – aidé de tous ses proxys – promet un déluge de feux sur Israël, des membres de l’UE veulent renouer avec le boucher de Damas. Aujourd’hui, huit Etats membres de l’UE[1] demandent un début de normalisation des relations avec le régime de Bachar Al-Assad ! Unique but : faciliter les renvois de Syriens … et plaire à des opinions publiques xénophobes. L’extrême droite française n’aurait pas manqué de se joindre à la fine équipe si elle avait gagné les dernières élections nationales, en nommant Thierry Mariani aux Affaires Etrangères et Eric Ciotti à l’Intérieur (méfions-nous, car ce n’est que partie remise pour 2027).

Normaliser avec la Syrie, c’est normaliser avec le Hezbollahperfusé par les centaines de millions de dollars de l’Iran – qui profite depuis des années de ses accointances privilégiées avec le régime de Bachar al-Assad pour convoyer des armes de tous calibres et des miliciens par centaines vers le Sud-Liban. Tout cela sous les regards bienveillants des militaires russes implantés dans leurs bases militaires en Syrie, sans lesquels le régime de Bachar Al-Assad serait tombé depuis longtemps. Tous sont liés !

Faut-il rappeler à l’Autriche, l’Italie, Chypre, etc. les scores de violations des droits humains qui sont les normes dans ces pays-là ? L’Iran : 853 condamnations à mort par pendaison en 2023[2], Russie : 10 000 condamnés accusés de discrédit de l’armée vis-à-vis de la guerre en Ukraine, la Syrie : au moins 43 morts sous la torture et 756 arrestations arbitraires depuis 9 mois, etc… Beaucoup des syriens renvoyés du Liban ou de Turquie passent par la case prison … syrienne, de façon arbitraire et sans jugement.

Pactiser un tant soit peu avec la Syrie de Bachar, c’est laisser gagner la gangrène des violations des droits humains. Normaliser avec la Syrie de Bachar, c’est normaliser avec l’Iran des mollahs, le Hezbollah de Nasrallah, la Russie de Poutine, la Corée du Nord, etc. Lequel de ces membres de l’Union Européenne va ensuite être le premier à demander aussi la légalisation de la torture … pour des cas d’exception pour commencer ?

Depuis 20 ans, Revivre dénonce ces violations des droits humains en Syrie[3]. Triste anniversaire. Nous marquerons cette date par une soirée de rencontres pour faire mémoire, se consoler, analyser et regarder l’avenir. Rendez-vous le jeudi 24 octobre à l’Institut du Monde Arabe à Paris. Ami-e-s de la Syrie libre et démocratique, nous vous attendons nombreux.


[1] Autriche, Chypre, Croatie, Italie, Grèce, Slovaquie, Slovénie, République Tchéque,

[2] https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2024/04/iran-executes-853-people-in-eight-year-high-amid-relentless-repression-and-renewed-war-on-drugs/#:~:text=Le%20nombre%20d’exécutions%20en,exécutions%20recensées%20au%2020%20mars.

[3] https://association-revivre.fr/un-proces-qui-grave-dans-le-marbre-les-crimes-du-regime-de-bachar-al-assad/

=> Newsletter n°21 – Septembre 2024

Hommage à Haitham NAAL

L’Association Revivre, dont l’objectif dès sa création a été le soutien aux anciens détenus d’opinion syriens a souhaité tout naturellement s’associer à l’hommage qui sera rendu à Haytham Naal dimanche 3 juillet 2022 à 15h30 au Foyer Grenelle, 17 rue de l’Avre, 75015 Paris. Haytham Naal avec Abbas Abas et Salameh Kailey sont les tous premiers anciens prisonniers pour lesquels Revivre s’est mobilisé.

Haytham Naal né en 1950 a été arrêté en 1975. Il avait 25 ans. Torturé, il a été libéré le 11 août 2002 et a ainsi passé 27 ans dans les geôles de la terrible prison de Tadmor. Il a été adopté par Amnesty International comme prisonnier d’opinion. Ses longues années d’incarcération ont eu pour conséquences de multiples séquelles médicales. Dans le journal Le Monde du 13 janvier 2012, l’article « Syrie les 3 naufragés de Tadmor » lui avait été consacré.

Chers amis, la vie volée à Haytham Naal est l’illustration des conséquences de l’Etat de Barbarie mis en place depuis des dizaines d’années par le clan Assad.

Pétition à l’occasion du 10°anniversaire du soulèvement en Syrie,

À l’occasion du 10°anniversaire du soulèvement en Syrie, 

Pour la Liberté, la Justice, la Démocratie et le respect des droits humains

Nous sollicitons votre signature pour l’Appel aux autorités politiques de notre pays.

Pour signer cliquer sur : http://chng.it/6YsncrTzSZ

Nous vous remercions par avance et comptons sur vous pour diffuser cet appel.

Le texte de la pétition:

Appel à l’occasion du 10° Anniversaire du début du soulèvement en Syrie

Signer sur Change.org                             Mars 2011 – Mars 2021            

  • l’occasion du 10ème anniversaire du soulèvement en Syrie, nous lançons cet appel aux personnalités et aux organisations qui, par leur signature, peuvent ainsi exprimer leur solidarité avec le peuple syrien. Merci d’avance.

Pour la Liberté, la Justice, la Démocratie et le respect des droits humains

Il y a 10 ans, en mars 2011, dans la foulée du Printemps arabe, commençaient les premières manifestations pacifiques contre le régime de Bachar Al-Assad. Elles furent immédiatement réprimées dans le sang par l’armée et les groupes paramilitaires. Le régime, avec l’aide de la Russie et des milices iraniennes, a utilisé contre le peuple syrien des armes lourdes, son aviation et ses armes chimiques. Les attaques ont été intentionnellement dirigées contre les civils et contre les infrastructures comme les hôpitaux et les écoles.

Le bilan, selon les différents observatoires (SNHR, OSDH), est tragique : 200.000 à 300.000 civils morts identifiés, mais le chiffre réel avoisine 500.000 civils et combattants ; plus de 130.000 détenus dans les geôles du régime ; près de 80.000 décédés sous la torture et les mauvais traitements, ou disparus.

La Syrie est aujourd’hui un champ de ruines ; la moitié des infrastructures ont été détruites ; 13,5 millions de personnes, soit près de 60 % de la population, ont besoin d’une aide humanitaire de base : nourriture, toit, eau potable, médicaments, produits d’hygiène, … Des millions d’enfants n’ont jamais connu les bancs de l’école. Plus de 7 millions de Syriennes et de Syriens sont réfugiés hors du pays ; plus de 7 millions ont été déplacés à l’intérieur.

Le pays est détruit et ensanglanté. Il faudra plusieurs décennies pour le reconstruire.

Nous n’acceptons pas que Syriennes et Syriens restent pris en otage par la Russie, la Turquie et l’Iran, ni leur abandon par la communauté internationale. Bien au contraire, nous affirmons que le devenir du peuple syrien martyrisé par Bachar Al-Assad, et dans certaines régions sous la férule de Daesh et des groupes intégristes qui jouent son jeu, nous concerne pleinement.

  • Pas de normalisation avec le régime de Bachar Al-Assad.
  • Plus que jamais, nous restons solidaires du peuple syrien et refusons toute impunité pour les responsables des crimes de guerre et crimes contre l’Humanité commis depuis 10 ans.

24/02/2021                                                                     Premiers signataires                                                                 

Personnalités : Michel MORZIÈRE, Président d’honneur de Revivre ; Gérard LAUTON, Secrétaire du CPSLD ; Hala ALABDALLA,Cinéaste ; Marcel BOZONNET, Comédien ; François BURGAT, Politologue, Aix-en-Provence ; Jean-Paul CHAGNOLLAUD, Professeur des universités émérite ; Catherine COQUIO, Professeure, Université Paris Diderot ; Irèna DESFONTAINES, Collectif des Amis d’Alep ; Bernard DREANO, Altermondialiste ; Olivier FAURE, Député de Seine-et-Marne ; Jean-Pierre FILIU, Professeur à Sciences-Po Paris ; Jacques GAILLOT, Évêque ; Geneviève GARRIGOS, Conseillère de PARIS ; Raphaël GLUCKSMANN, Eurodéputé ; Guillaume GOUFFIER-CHA, Député ; Sébastien GRICOURT, Directeur de l’Observatoire Balkans de la Fondation Jean Jaurès ; Bernard GUETTA, Eurodéputé (Liste RENEW EUROPE) ; Isabelle HAUSSER, Écrivaine ; Albert HERSZKOWICZ, Médecin, Président de MEMORIAL 98 ; Joël HUBRECHT, Juriste ; Élisabeth KERTESZ-VIAL, MCF* honoraire ; Firas KONTAR, Juriste ; Aurore LALUCQ, Eurodéputée (Liste ENVIE D‘EUROPE) ; Michelle LAUTON, MCF* honoraire ; Agnès LEVALLOIS, Maître de recherche (Moyen-Orient) ; Didier MAGNE, ex Directeur de projetsinternationaux ; Ziad MAJED, Professeur universitaire ; Farouk MARDAM BEY, Éditeur ; Roland MÉRIEUX (ENSEMBLE) ; Henri MERMÉ (ENSEMBLE) ; Samira MOBAIED, Syriens Chrétiens pour la Paix (SCP-FRANCE) ; Raphaël PITTI, Médecin Humanitaire ; Jean-Luc RAYNAUD, Auteur-réalisateur ; Hélène ROUDIER DE LARA, Professeur émérite de Philosophie ; Malik SALEMKOUR, Président de la LDH ;Annie SARTRE-FAURIAT, Professeur des universités émérite ; Francis SITEL (ENSEMBLE) ;Béatrice SOULÉ, Réalisatrice ; Aurélien TACHÉ, Député du Val d’Oise et Co-président des NOUVEAUX DÉMOCRATES ; Mohamad TAHA, Président du CPSLD ; Christian TERRASS, fondateur et éditeur de GOLIAS ; Leïla VIGNAL, MCF*, Université Rennes 2 ; Emmanuel WALLON, Professeur, Université Paris Nanterre ; Nicole WOLKONSKY, Présidente d’un Pôle des Métiers d’Art ;

Organisations : Revivre ; Collectif pour une Syrie libre et démocratique (CPSLD) ; Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP) ; GOLIAS ; MEMORIAL 98 ; Syriens Chrétiens pour la Paix (SCP-France) ; Ligue des Droits de l’Homme (LDH) ; Réseau EUROMED-France (REF) ; ATTAC ; Parti Socialiste (PS) ; ENSEMBLE ; Europe-Écologie-Les Verts (EELV) ; Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale (CEDETIM) ;

  • MCF : Maître de conférences.

Journée de solidarité avec les femmes syriennes, le 11 mars 2018

Revivre participe à l’organisation de la journée de solidarité avec les femmes syriennes (contre le viol des femmes dans les prisons du régime) qui aura lieu le Dimanche  11 mars (de 15h30 à 19h.)  à l’Institut du monde arabe à Paris.

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Programme de la journée :

15h30 : Accueil
15h45-17h15 : Table Ronde «Le viol, une arme de destruction»
Modérée par Catherine Coquio, professeur à l’université Paris 7, responsable du
groupe de recherches Littérature et savoirs à l’épreuve de la violence politique.
Intervenants :

  • Mariah al Abdeh, directrice exécutive de l’ONG syrienne Women Now for Development
  • Eric Sandlarz, psychologue clinicien-psychanalyste au Centre Primo Levi
  • Joël Hubrecht, chercheur associé à l’Institut des Hautes Études sur la Justice
  • Nina Walch, coordinatrice crises et conflits armés à Amnesty international.
  • Lecture de témoignages par Dominique Blanc, Darina Al-Joundi et Leyla-Claire Rabih.

17h15-17h30 : Interlude musical par Naïssam Jalal et Mohanad Aljaramani.
17h30 : Projection du film Le Cri étouffé en présence de Manon Loizeau et d’Annick Coajean.
18h45 : Clôture avec les auteures du film.

Le  lien vers l’événement sur le site de l’IMA https://www.imarabe.org/fr/rencontres-debats/journee-de-solidarite-avec-les-femmes-syriennes

Evènement Facebook :  https://www.facebook.com/events/1763283283978288/

« De l’ardeur » Prix Renaudot 2017

Justine Augier, vient d’être couronnée du Prix Renaudot 2017, dans la catégorie Essais, pour son livre « De l’ardeur » paru cette année en septembre aux Éditions Actes Sud.

« De l’ardeur » reconstitue le portrait de Razan Zaitouneh, avocate syrienne, militante des droits de l’homme, figure de la dissidence syrienne. Elle a créé le centre « VDC » – Violations Documentation Center in Syria –  qui archivait les crimes commis par le régime, et sans épargner ceux des groupes intégristes, elle recueillait les témoignages  des détenus survécus à la torture dans les prisons et les centres de détention. Le 10 décembre 2013, elle a été enlevée avec trois de ses compagnons de lutte , dont son mari, par des individus masqués. Depuis lors, aucune nouvelle sur leur sort.

Denier paragraphe d’un ancien article de Razan Zaitouneh , écrit à Ghouta, dans les faubourgs de Damas et traduit de l’arabe par Rania Samara :

 « La route est encore longue, elle est semée d’obstacles et de mines. Au bout, elle est encore bloquée et, par-delà, c’est l’inconnu. Plus tard, après le siège, après la révolution, après la guerre, il y aura toujours ce rêve unique qui nous unit. C’est comme si, munis de pioches, nous formons une longue chaîne humaine qui avance lentement, qui avance sûrement, vers la fin de la route. Béni soit celui qui y parviendra ! »

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Vidéo: Justine Augier – De l’ardeur : histoire de Razan Zaitouneh, avocate syrienne

 

 

Photos : « Comment, demain, faire revivre la Syrie ? »

La table ronde « Comment, demain, faire revivre la Syrie ? » organisée par l’Association Revivre, animée par l’écrivain Isabelle Hausser
18 mars 2017, de 19h à 21h, à l’Institue du Monde Arabe

Les intervenants suivant l’ordre de prise de parole

1 avec Salam

2 Joël Hubrecht

3 Omar Guerrero

4 Dr Ziad Alissa

5 Sophie Cluzan

Isabelle Hausser

Le public

Photos : capture d’écran de la vidéo en direct de : La Voix Des Syriens – LVDS, Face Book

https://www.facebook.com/LaVoixDesSyriens/videos/1245373745511194/?hc_ref=PAGES_TIMELINE

 

« Comment, demain, faire revivre la Syrie ? » Intervention de Joël Hubrecht

Pour que revive la Syrie : l’incontournable recours à la justice transitionnelle.

Joël Hubrecht, Institut des hautes études sur la justice[1]

18 mars 2017, à l’Institue du Monde Arabe

Souvent réduites aux commissions vérités et aux tribunaux internationalisés dont ils sont la forme la plus connue, la Justice transitionnelle se définit plus largement comme l’ensemble des mécanismes dont un pays se dote pour faire face à ses crimes de masse passés[2]. Elle repose sur quatre piliers : le droit à la vérité, à la justice, aux réparations et à la non-répétition. La dénomination de cette forme de justice particulière[3]contient en elle deux promesses qui reflètent parfaitement ce que les révolutionnaires syriens poursuivent depuis plus de six ans : une promesse de justice et une promesse de transition.

Aujourd’hui, ces deux objectifs semblent hors de portée tant le rapport de force, grâce à l’intervention irano-russe et uniquement grâce à elle, pèse en faveur de la sauvegarde du régime au détriment des forces d’opposition.  Et pourtant…, même si les négociations en cours poussent en un sens contraire, ces deux espérances ne pourront pas être purement et simplement annihilées.

Pourquoi les enjeux de la justice transitionnelle sont incontournables, et le resteront

Tout d’abord parce que les crimes ont été massifs et sont imprescriptibles et que ce soit maintenant ou dans deux générations, comme le prouvent à peu près toutes les autres situations où l’impunité a été imposée (au Cambodge, au Salvador, etc.), la demande de justice restera forte et irrépressible. Cette ampleur des crimes, qui implique un nombre immense de victimes et de criminels, excède apriori les capacités de traitement de toute juridiction ordinaire même richement dotée et performante, ce qui n’est assurément pas le cas des juridictions syriennes. A l’absence de volonté politique qu’oppose un Bachar el-Assad s’ajoute la déliquescence d’institutions elles aussi en ruine. C’est pourquoi la nécessité de recourir à des moyens de justice alternatifs, moyens qui composent la grande variété des mécanismes dit de justice transitionnelle (historiquement développés à partir de l’impossibilité d’engager des poursuites pénales), s’impose manifestement.

Deuxièmement, les enjeux de justice transitionnelle restent incontournables parce la volonté de changement perdure comme le montre, malgré les années de guerre et d’épreuves, la reprise des manifestations de rue dans les zones bénéficiant de quelques accalmies. « Tous les événements survenus en Syrie ont eu lieu pour que se produisent un changement, une transition politique », expliquait Abdelahad Astepho (Vice-président de la Coalition de l’opposition syrienne – CNS)[4].Or on ne peut pas dissocier, comme le prétendent les Russes et le régime, les questions de justice, de paix et de politique. La demande de justice, qui était présente dès le début des manifestations demandant la libération des enfants de Deraa et le rejet du système répressif, malgré la mise à mort et l’exil de centaines de milliers d’opposants, n’a fait que s’accroître avec le déchaînement des violences.

Tout aussi forte la volonté de dire ce qui se passe dans les prisons du régime aujourd’hui, à Saidnaya par exemple, mais aussi de revenir sur les racines plus anciennes des tortures pratiquées à l’époque de Hafez el-Assad (qu’on pense au film de Monika Borgmann et Lokman Slim, Tadmor, dans lequel d’anciens détenus reconstituent leur détention dans la prison de Palmyre[5]).

Ainsi nous ignorons aujourd’hui quelles seront les formes précises que la justice transitionnelle pourra prendre en Syrie après (après la fin de la guerre, après la conclusion des négociations de paix, après le retour des réfugiés et déportés), mais nous savons que les questions des responsabilités, des disparus, des prisonniers, des réparations et des réformes pour juguler le retour de la répression forment le cœur des revendications et du projet de l’opposition syrienne. Ainsi, même si cette demande de justice est évacuée, minorée ou laissée implicite[6] dans le cadre de certaines résolutions internationales et des négociations menées au forceps sous l’égide de la diplomatie russe, les autres enjeux de la reconstruction – reconstruction économique, stabilisation politique suffisante pour aller vers une république décentralisée – ne seront pas tenables durablement sans, tôt ou tard, devoir y revenir.

De solides prémisses : des projets et des réflexions existent déjà depuis plusieurs années

C’est pourquoi, très vite, dès 2012, alors même que la perspective de la fin de la guerre restait lointaine, une réflexion s’est développée à ce sujet. Radwan Ziadeh en est un des principaux acteurs. Cet ancien responsable de programmes sur la justice transitionnelle de l’Arab World Project est à la manoeuvre dans les principales initiatives entreprises pour soutenir la mise en œuvre, après-guerre, d’une justice transitionnelle en Syrie. Le Syrian Center for Political and Strategic Studies (The Syrian Center for Political and Strategic Studies (SCPSS)) a élaboré en 2013 une feuille de route pour la transition en Syrie et a organisé à Istambul, les 26–27 janvier 2013, une conférence (“Transitional Justice in Syria : Accountability and Reconciliation.”) qui a réuni plus d’une centaine de participants de Syrie et du monde entier. A l’issu de cette conférence, ont été créé l’association de défense des droits des victimes de la Révolution[7] ainsi qu’un comité national préparatoire (et un comité international de conseil) qui, quelques mois plus tard, en novembre 2013, est devenu « la Commission syrienne pour la justice transitionnelle (CSJT/SCTJ) ».  Cette entité réunit, sous la houlette de Radwan Ziadeh, qui en est le directeur, des juges, des avocats, des militants des droits de la personne et des universitaires. Plusieurs ateliers ont été organisés en Turquie et en Égypte dont l’un sur la justice transitoire[8].

De façon convergente avec la mise en place de cette commission, il faut aussi mentionner les travaux sur le sujet d’une cinquantaine de Syriens réunis sous le nom de « The Day After project » (Le jour d’après). Ce groupement a également inscrit la justice transitionnelle parmi les objectifs-clés pour penser le futur démocratique du pays et les moyens d’une transition. Le projet du Jour d’Après a été présenté le 28 août 2012 à Berlin, et est disponible sur un site web dédié[9]. Autre lieu emblématique de réflexion de la justice transitionnelle (en lien avec les précédentes initiatives), La maison des experts syriens[10] qui regroupe sous son toit 300 participants de milieux trsè divers (militants, universitaires, juges, avocats, politiciens d’opposition, militaires, représentants locaux, etc). Ceux-ci se sont réunis régulièrement en 2012 et 2013 et ont rédigé une « feuille de route » disponible sur internet[11] et toujours d’actualité. Le 29 et 30 décembre 2015, le SCPSS et le SHE ont tenu à Istambul une conference : “Transitional Justice in Syria after Vienna Process: Achieving Justice and Accountability”.

D’autres voix très écoutées vont dans le même sens. Mohammad Al Abdallah, qui a mis en place à Washington, où il est exilé, le Centre syrien de justice et de responsabilité (The Syria Justice and Accountability Centre – SJAC[12]), qui documente les violations des droits de l’homme depuis mars 2011, dit explicitement que : «Au-delà d’une action devant la justice internationale dont les coûts sont exorbitants et les résultats changent peu la vie des gens, nous espérons que notre base de données servira à un processus de justice transitionnelle qui permette aux Syriens de vivre ensemble une fois la guerre terminée.»

En France, L’Initiative arabe de réforme (ARI)[13] – un consortium présidé par Bassma Kodmani regroupant des instituts de recherche arabes – s’est également engagé dans des activités de soutien autour de ces questions, avec notamment l’aide à la création d’une association dédiée à la reconstruction des institutions judiciaires et à la formation de juges syriens,  l’AJDI.

Que disent ces rapports ?

Les experts s’accordent pour dire que pour lancer véritablement un processus de justice transitionnelle, il faudra d’abord que les combats aient cessés et que la situation soit plus durablement stabilisée. Il faut aussi une réelle volonté politique en sa faveur et, pour les réformes institutionnelles en particuliers se projeter jusque dans le long-terme.

Le rapport du « Jour d’après » propose un calendrier par étapes et une stratégie relativement détaillée, en abordant des points très précis (comme la nécessité de suspendre ou d’abolir la peine de mort pour pouvoir bénéficier de l’aide de fonds internationaux). Mais tout comme la feuille de route de la maison des experts syriens, ces rapports buttent forcément sur le flou de ce que « le Jour d’après » appelle la « Syrie post-Assad ». C’est pourquoi, à ce stade, ils discutent des avantages et inconvénients des différentes formes de mesures possibles plus que des moyens concrets de leur mise en place effective. On notera cependant que, s’il demeure finalement assez vague et théorique, ce catalogue ne se réduit pas à un exercice de bonnes intentions mais se montre plutôt prudent (évitant de trancher de façon intempestive des arbitrages complexes) et lucide, notamment sur la question des ressources.  Le rapport du « Jour d’après » pose ainsi d’emblée le défi du manque de moyens (en proposant la création d’un Fond d’Etat dédié dans lequel abonderait une taxe nationale et des donations étrangères). Le rapport de la maison des experts avertit qu’il faudra forcément choisir entre le volume des réparations et leurs bénéficiaires, l’élargissement de la catégorisation des victimes entraînant mécaniquement une réduction des prestations ou montant financier de ces programmes. Les perspectives de justice transitionnelle envisagées sont ambitieuses et ouvertes mais il ne s’agit donc pas de promettre monts et merveilles, ce qui serait fatidique tant la désillusion et les frustrations qui s’en suivraient seraient alors inévitables.

Construit autour des piliers évoqués en introduction (les 4 fameux piliers Joinet), on notera d’abord l’insistance pour que, au-delà de l’assistance internationale nécessaire, le processus soit construit et conduit d’abord par les Syriens eux-mêmes. C’est un point fondamental. Le processus de JT ne peut être l’importation d’un programme élaboré et mis en place par des experts internationaux. La CPI existe déjà, avec ses statuts, et si une Syrie libre était enfin  en mesure de ratifier le Statut de Rome, elle intégrerait un système préexistant. Pour la justice transitionnelle, il en va autrement. Ses programmes ne sont pas prédéfinis. Il est donc possible – non seulement possible mais indispensable – d’associer la population syrienne à son élaboration et de tenir compte des perceptions et des attentes notamment au travers d’une consultation nationale.

La nécessité d’avoir des garanties d’indépendance, d’impartialité, de transparence est aussi fortement soulignée dans tous ces rapports. Les mécanismes proposés doivent permettre d’éviter une amnistie générale aussi bien qu’une lustration brutale et sans examen dans l’administration (contre ceux qu’on associerait apriori à l’ancien régime). Les rapports plaident pour une amnistie conditionnée et une lustration motivée et encadrée (le contre-exemple étant évidemment ce qui s’était fait en Irak après la chute de Saddam Hussein).

Les actions les plus immédiates concernent la formation de personnels qualifiés à ce type de mécanisme et le recueil et la préservation de la documentation sur les crimes. Cette documentation devant servir à un travail non-juridique d’établissement des faits, qui serait conduits par des sous-commissions spécialisées (en fonction de la nature des violences traitées : torture, exécutions extra-judiciaires, disparitions) et un matériel pouvant servir à des actions judiciaires.

Dans tous les rapports, il est répété que le travail d’établissement des faits par un mécanisme de commission-vérité, ne devra pas se substituer à la possibilité d’engager des poursuites pénales contre les principaux responsables. Une exigence qui va tout à fait dans le sens des leçons tirées (et des insuffisances constatées) des autres expériences de justice transitionnelle, à partir desquelles il apparaît clairement que la justice (dans sa dimension judiciaire) doit rester une composante importante de la justice transitionnelle. Dans la plupart des rapports, s’il est prévu de reconstruire et de faire en sorte que des procès soient possibles devant des cours syriennes, c’est le projet de création d’un tribunal hybride qui est très clairement privilégié. Celui-ci regrouperait des magistrats internationaux et des Syriens sur la base d’un statut ad-hoc s’inspirant des procédures syriennes et des standards et procédures internationales[14].

La mise en œuvre des propositions de ces rapports est-elle encore crédible ?

Bien sûr, le contexte actuel est particulièrement sombre. La création d’un TPI ad-hoc n’est pas à l’ordre du jour. Le déséquilibre des forces est en faveur d’Assad, le pouvoir de blocage des Russes au Conseil de sécurité font que les mécanismes de justice internationale déjà existants, comme la Cour pénale internationale, apparaissent hors d’état d’agir. De plus, même si l’opposition conserve ou arrache la gestion de certaines zones libérées à l’intérieur du pays, le régime d’Assad sera certainement en mesure d’assurer, au moins temporairement, l’impunité et de servir de refuges aux criminels sur la partie du pays qu’il continuera de pleinement contrôler.

Telle qu’elle se dessine, nous serions donc probablement en face d’une situation relativement inédite : pas celle d’une justice de transition telle que nous l’avons à l’esprit lorsqu’on pense à des cas comme celle de l’Afrique du sud ou de la Tunisie mais pas non plus d’une « justice transitionnelle sans transition ». Car, d’une certaine manière, même s’il reste en place, le régime d’Assad s’est en réalité, derrière les apparences, déjà « effondré de l’intérieur », engageant dans la douleur et en profondeur, au-dehors du palais-Potemkine du mont Mezzeh, l’inexorable refondation de la communauté politique syrienne. La révolution a commencé et se poursuit par le bas. Vraisemblablement la justice transitionnelle sera elle aussi davantage portée « par le bas » que « offert » et mise en œuvre par le « haut ». Cette hypothèse recoupe un mouvement plus ample auquel on assiste, après 6 ans de guerre et de négociations stériles, dans d’autres domaines comme celui de la reconstruction architecturale (ainsi l’ONG Ila Souria soutient une « reconstruction par le bas » en participant à des formations, comme à Gaziantep, avec des architectes syriens, qui ont travaillé sur la question des villes transitoires post-catastrophe et des camps de transit[15]). Si le soutien politique est indispensable, tout ne vient pas pour autant d’en haut. Au Burundi, le processus institutionnel de justice transitionnelle (qui prévoyait la mise en place d’une commission vérité et d’un tribunal spécial) a été bloqué par un pouvoir qui aujourd’hui est retombé dans sa fuite en avant vers une violence de nature peut-être même génocidaire. Mais pendant des années, dans un contexte d’auto-amnistie et d’immunité reconductible des responsables politiques, des acteurs de la société civile avaient imaginé des solutions de recours, à leur échelle, avec les représentations locales d’une série de pièces de théâtre sur les crimes du passé suivie de l’organisation de groupes de paroles[16].

On peut aussi penser que, même si elle est d’une façon ou d’une autre organisée et pacifiée, la fragmentation et la division du pays demeurera une donnée de base – et en partie un obstacle – pour le développement d’un processus de justice transitionnelle homogène global. Cela sera un vrai défi puisque l’égalité de traitement de tous les citoyens fait partie des exigences d’une justice équitable. On ne peut pas donc non plus se satisfaire d’un processus à plusieurs vitesses ou en forme de gruyère. Il faudra donc faire preuve d’originalité et ne pas se contenter de reproduire ce qui s’est fait précédemment ailleurs.

Voudrait-on le faire, qu’on aurait d’ailleurs bien du mal, car la perspective de l’originalité future de la justice transitionnelle en Syrie n’a en soi rien de surprenant tant aucun exemple de justice transitionnelle du passé ne ressemble à un autre : ici le processus combinera commission vérité et tribunal mixte (Sierra-Leone), là l’accent sera mis sur la désignation et l’aveu des responsables (Afrique du sud) alors qu’ailleurs l’accent sera placé sur les réparations et les noms des responsables ne seront pas rendus publics (Maroc). Ici ce sera un massacre particulier ou une courte période qui fera l’objet d’enquêtes alors que là ce seront des décennies et plusieurs régimes successifs qui feront l’objet d’un rapport. Ici on aura recours à des juridictions internationalisées, là à des formes de justice traditionnelles. Les processus les plus réussis – sachant qu’au bout du compte cette réussite est toujours relative et limitée – sont ceux qui auront trouvé des formes nouvelles, adaptées à la forme très particulière des crimes de masse qui y ont été commis. En Afrique du sud, l’apartheid et au Rwanda, le génocide perpétré par la mobilisation de toute la population n’appelait pas le même type de justice transitionnelle. Un des traits marquants pour la Syrie est qu’elle aura à la fois connu un régime tyrannique, avec son système de contrôle et de repression des opposants, et cela sur une très longue durée et également une guerre particulièrement barbare de bombardement et de gazage des populations civiles.

Des créations originales, nous en avons déjà l’exemple avec celle du Mécanisme international, impartial et indépendant (MIII), fruit d’un vote de l’Assemblée Générale (AG) de l’ONU pour contourner le blocage du Conseil de sécurité. Jusque-là c’était plutôt le Conseil qui était à la manœuvre en matière de JPI par la création de Tribunaux pénaux ad-hocs ou la saisie de la CPI. Ce Mécanisme chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Républiques arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables devrait désormais être intégré au sein des négociations et être relié à l’élaboration d’un processus de justice transitionnelle. L’art. 8 (§2) du rapport du 19 janvier 2017 du Secrétaire général de l’ONU[17] décrit d’ailleurs le MIII explicitement comme une « institution de JT ». Et c’est bien à ce titre qu’il faut appuyer et investir le mécanisme, et non sur le modèle du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie ou du Tribunal pénal international pour le Rwanda, c’est-à-dire penser le MIII dans la perspective de procès conduits dans plusieurs pays (dans le cadre de la compétence universelle[18]) mais aussi de futurs procès en Syrie, et avec une collaboration étroite avec des acteurs syriens.

On peut supposer, parce que le pays est en ruine matériellement et politiquement, que le processus reposera sur l’implication de la société civile syrienne d’une part et qu’il aura besoin d’autre part du soutien de pays de la communauté internationale, et notamment de l’Union européenne. C’est-à-dire, de deux leviers extérieurs au gouvernement syrien lui-même. C’est ce type d’attelage justement qui pourra permettre la co-construction d’institutions gouvernementales rénovées par la refondation d’un nouveau corps politique. Mais aussi, et c’est fondamental, la réhabilitation et la recrédibilisation de l’ONU et de la communauté internationale qui a failli dans sa mission d’aide et de secours. Les enjeux de la reconstruction dépassent le cadre de la Syrie et nous concerne aussi. Inutile d’insister sur l’inaction et l’absence de l’Union européenne pendant le conflit…Mais justement l’UE ne doit pas revenir dans le jeu comme un simple organe financier et technique, sans lecture et exigences politique sur la nature de la reconstruction qu’elle soutient. Elle doit poser elle aussi ses exigences et si elle fournit une aide à la reconstruction, le faire en la conditionnant au respect et à la mise en œuvre de procédures de justice transitionnelle.

Co-construction d’institutions par la co-construction d’un processus de justice transitionnelle donc. Ce processus est dynamique et évolutif. Si les objectifs sont indispensables à la pensée de l’action, ils sont sans doute en tant que tel inatteignables dans leur intégralité (dans leur pureté pourrait-on dire !) : vérité, réconciliation…Mais les résultats ne sont pas à attendre en bout de course. Ils se confondent avec la manière même dont on avance dans le « dur », dans le concret des rapports de force et des moyens disponibles.

Cette inventivité et cette force de la société civile existent en Syrie comme en a témoigné la forme de législations temporaires et de moyens de règlement des conflits dans les zones où l’autorité de l’Etat avait disparu, notamment dans la ville d’Alep où des cours temporaires avait été créée afin de gérer les litiges entre les civils et entre ces derniers et les combattants[19]. On peut aussi imaginer s’inspirer et avoir recours à des formes plus traditionnelles de règlements des litiges (comme le Rwanda l’avait fait avec les tribunaux du gazon, les gacacas). S’appuyer par exemple sur des représentants ou des modes de la justice tribale (la Soulha) ? C’est une question (plus qu’une préconisation affirmée) car il faut aussi se méfier de l’illusion du recours à la tradition et surtout prendre garde de ne pas enfermer la JT dans des lignes ethniques et confessionnelles qui fragmentent le pays et sont instrumentalisées par le pouvoir.

Des innovations sont possibles aussi en termes de réparations (individuelle mais aussi collective), de CVR (régionale, mixte, intertionalisée). Le rapport de la Maison des experts syriens (Syrian transition map road) conseille ainsi, de ne pas se focaliser exclusivement sur la documentation et les poursuites, mais de créer un site web pour honorer les familles des victimes et faciliter les contacts entre les victimes, qu’elles soient syriennes ou même d’un autre pays et d’un autre conflit. Penser l’articulation avec le DDR (démobilisation, désarmement, réintégration), c’est-à-dire la question des centaines de milliers de déserteurs, celle des milices privées, la démobilisation des hommes de l’ALS, la réintégration des anciens combattants sans que cela n’entre en contradiction totale avec les demandes ou les attentes des victimes. Il faut aussi reprendre l’éducation des enfants qui n’ont connu que l’école de la guerre et de l’exil, traiter des compensations pour les personnes qui ont perdu leurs logements, etc. Ces questions dépassent le seul cadre de la JT mais il doit y avoir des ponts entre les programmes et les projets.

Comment la justice transitionnelle peut-elle contribuer à faire revivre une Syrie fragmentée ?

Il ne suffit pas pour penser cet après de la justice transitionnelle de faire le catalogue exhaustif des diverses options que l’on pourrait théoriquement imaginer, l’important est :

  • de préparer dès aujourd’hui les conditions les plus propices possibles à la co-construction d’un futur processus pour qu’il soit à la fois inclusif et cohérent : c’est-à-dire de sensibiliser les diplomaties internationales engagées dans le conflit que l’enjeu JT est incontournable, identifier et tisser les liens avec les associations syriennes ou des professionnels de la justice, commencer à établir une base de données pour recenser les victimes et les crimes, préserver des moyens de preuves, etc.
  • mais aussi, et surtout, car c’est la condition de l’appropriation et de la possibilité d’innover, de comprendre, au-delà de leurs formes particulières, comment et pourquoi ce type de justice peut contribuer à relancer le dialogue dans une société fragmentée.

Car la guerre ne détruit pas que les vies, les hôpitaux et les maisons. Elle détruit aussi les mots, la possibilité du langage et du dialogue social. Ce n’est évidemment pas un hasard si des écrivains, comme Isabelle Hausser[20], se mobilisent face à de telles situations. La possibilité du dialogue est anéantie non seulement par le repli communautaire ou la surpolitisation des mémoires mais, plus fondamentalement, par l’empoisonnement de la langue par les appareils de propagandes et par l’incommunicabilité des souffrances et des traumatismes. C’est donc d’abord là, dans la recherche d’une langue sinon commune du moins partageable, que le tissu social doit être recousu. Et la justice transitionnelle est un formidable moyen de recréer et de pluraliser des espaces de dialogues.

Je n’ai pas la possibilité de rentrer ici dans le détail de cette dynamique[21], que l’on peut esquisser de la manière suivante :

  • dans le cadre d’un procès : la co-présence des parties (les victimes et les accusés) ; le rôle des représentants et des intermédiaires de justice ; la disposition de chacun des protagonistes, qui occupent une place déterminée par la procédure, amorçant une reconnaissance sociale et une reconnaissance mutuelle (par distinction avec une reconnaissance « fraternelle ») ; la confrontation argumentative, les interrogatoires et contre-interrogatoires, qui ne se confondent pas avec une conversation libre et ouverte mais, sous la présidence d’un juge qui veillera à ce que la parole soit distribuée équitablement, permet un débat contradictoire public qui débouchera sur la délibération des juges et à un jugement consensuel ou, en cas d’opinion dissidente d’un des juges, à la majorité des voix ; les débats et les conclusions des juristes peuvent être complexes et techniques mais le verdict clarifie les responsabilités et tranche entre culpabilité et acquittement, libère la parole des témoins, permet de « faire en public la mémoire publique »[22].
  • dans le cadre d’une commission vérité, les procès sont remplacés par des déclarations écrites et des auditions publiques. Le jugement judiciaire est remplacé par un rapport produit par un panel de commissaires, regroupant des personnalités reconnues et consensuelles, des universitaires, des religieux, etc. D’autres approches colorent les discours (religieuse, psychanalityque…). Les discours tenus n’ont plus la froideur technique du droit. L’émotion sous contrôle voir bannie des palais de justice peut être au contraire recherchée et mise en scène au nom d’une volonté cathartique. Lors des audiences publiques de la célèbre Commission vérité réconciliation d’Afrique du Sud, un cierge était allumé à la mémoire « de tous les morts des affrontements du passé », des prières étaient adressées, des poèmes étaient lues, et après les témoignages entendus, son président Mgr Desmond Tutu résume ainsi le sentiment de l’assemblée : « Nous avons été émus aux larmes. Nous avons ri. Nous avons gardé le silence et nous avons regardé droit dans les yeux la bête immonde de notre sombre passé. Ayant surmonté cette terrible épreuve et prenant conscience de notre commune humanité, nous commençons à réaliser que nous sommes capables de surmonter les affrontements d’hier et de nous tendre la main »[23].

Conclusion :

Voilà comment, grâce à la justice, la parole « reprend ses droits », reprend sens. Sinon, si la Syrie ne devait pas pouvoir « revivre », si elle ne devait plus être qu’un pays vidé de ses habitants et un champ de ruine à la main de Bachar al-Assad, si la « paix » négociée n’était que celle des cimetières et de la soumission, alors, il faut bien avoir conscience que la Syrie ne serait pas la seule à mourir. L’ONU aussi y perdrait son « âme » et le « jour d’après » serait celui du « monde d’après » : un monde que certains qualifient, pour s’en désoler ou s’en réjouir, de « post-occidental » mais qui serait peut-être d’abord « post-humain » dans la mesure où la torture et le crime contre l’humanité y seraient ouvertement revendiqué au nom de leur efficacité (« It works ! », pour reprendre la formule d’un président en exercice[24]). Ce monde nous ouvre ses portes mais, comme nous l’avons vu, comme nous essayons avec l’association Revivre de le penser ensemble, d’autres mondes restent malgré tout possibles.

Des mondes où les mots auront retrouvé toute leur portée, et où raisonneront pleinement le sens de phrases telles que celle-ci : « Voici le premier progrès que l’esprit de révolte fait faire à une réflexion d’abord pénétrée de l’absurdité et de l’apparente stérilité du monde. Dans l’expérience absurde, la souffrance est individuelle. A partir du mouvement de révolte, elle a conscience d’être collective, elle est l’aventure de tous. (…) Le mal qui éprouvait un seul homme devient peste collective. Dans l’épreuve qui est la nôtre, la révolte joue le même rôle que le cogito dans l’ordre de la pensée : elle est la première évidence. Mais cette évidence tire l’individu de sa solitude. Elle est un lieu commun qui fonde sur tous les hommes la première valeur. Je me révolte, donc nous sommes ». Ces mots ont été écrits, il y a 65 ans, par Albert Camus dans L’homme révolté[25]. Ils sont précieux car c’est bien dans la préservation et le développement de ce « nous » que réside le plus grand espoir pour la Syrie de demain et c’est à cela que peut contribuer la justice transitionnelle.

Notes

[1] Ce texte a été préparé pour la table-ronde « Comment demain faire revivre la Syrie ? », organisé par l’association Revivre le 18 mars 2017 à l’Institut du Monde arabe.

[2] K. Andrieu et G. Lauvau (sous la dir.), Quelle justice pour les peuples en transition ?, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2014.

[3] Que l’on peut faire rétrospectivement remonter, dans ses premières réalisations concrètes, à des procès conduits après la fin de la seconde guerre mondiale (Nuremberg) mais qui s’est conceptuellement construit à partir du développement des commissions vérités et des expériences latino-américaines dans les années 80.

[4] « En Syrie, on laisse de nouveau la place aux plus fanatiques », Mediapart.fr, 19 févr. 2017.

[5] Tadmor, un film de de Monika Borgmann et Lokman Slim, Les films de l’étranger, 2016. J. Chalier, « L’abattoir de Saidnaya », Esprit, mars-avril 2017.

[6] Voir la résolution 2254 (2015), adoptée par le Conseil de sécurité à l’unanimité de ses 15 membres en décembre 2015, qui trace une « feuille de route » faisant référence aux obligations du Droit international mais n’aborde jamais en tant que tel la question des poursuites des criminels de guerre.

[7] Cette association regroupe des familles comme celle de Hamza al-Khateeb, considérée comme la première victime de la révolution, ou d’autres figures emblématiques comme Muhammad al-Jawabrah; Ghayyath Matar; and Tamir al-Shar’i…

[8] Les autres portaient sur la réforme de l’appareil judiciaire, les réformes politiques, la réforme du secteur de la sécurité, la réforme de l’économie et la réforme des systèmes de santé et d’éducation.

[9] http://thedayafter-sy.org/wp-content/uploads/2014/12/thedayafteren.pdf

[10] the Syrian Expert House (SHE)

[11] http://syrianexperthouse.org/archives/775

[12] https://syriaaccountability.org/

[13] http://www.arab-reform.net/

[14] L’association AJDI mentionnée précédemment a développé une réflexion allant dans ce sens pour éviter de reproduire des structures ad-hocs qui, trop empruntes des procédures de Common Law (qui dominent encore la plupart des juridictions pénales internationale), se révéleraient inadaptées.

[15] Voir Emmanuel Haddad, « Syrie : l’urgence de penser la reconstruction », blog de l’auteur (journaliste indépendant), http://emmanuelhaddad.com/?p=1431 ; lors de cette même table-ronde du 18 mars 2017 à l’IMA, les propos du Dr Ziad Alissa, président de l’UOSSM France, sur le rôle des comités locaux et la reconstruction « par le bas » de l’aide médicale allaient eux-aussi dans le même sens.

[16] Sur ces initiatives voir Anne-Aël Pohu et Emmanuel Klimis (sous la dir.), JusticeS transitionnelleS. Oser un modèle burundais. Comment vivre ensemble après un conflit violent ?, RCN Justice et démocratie, Facultés universitaires Saint-Louis de Bruxelles, 2013.

[17] Document A/71/55 : Rapport du Secrétaire général, Application de la résolution portant création d’un Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Républiques arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables. 19 janvier 2017, Soixante et onzième session, Point 31 à l’ordre du jour, Prévention des conflits armés.

[18] Sur le levier de lutte contre l’impunité que constitue la compétence universelle voir les articles à paraitre dans la revue Esprit (mai 2017) et sur le site de l’IHEJ (www.ihej.org).

[19] La Cour de l’Unité, s’appuyant sur des textes variés tels que le Code de l’Unité de l’Union arabe, jamais utilisé auparavant, ou encore la charia afin de gérer les litiges familiaux, avait ainsi été institutionnalisée afin de répondre au besoin de d’administration et de gestion entre les civils.

[20] Inspirée par son séjour de plusieurs années en Syrie, voir d’Isabelle Hausser Petit Seigneur, Editions de Fallois, 2010 etLes Couleurs du sultan, Editions Buchet/Chastel, 2016. Isabelle Hausser a animé la table-ronde du 18 mars 2017 à l’IMA pour laquelle ce texte a été rédigé.

[21] Pour un développement de cet aspect, voir Joël Hubrecht, « Après un crime de masse, comment la justice peut-elle relancer le dialogue ? », revue Plurielles, n°20,AJHL, Paris, 2017, p 32-41 (accessible sur le site www.ajhl.org dans la rubrique Plurielles).

[22] Mark Osiel, Juger les crimes de masse. La mémoire collective et le droit, Seuil, 2006, p.425.

[23] Desmond Tutu, Il n’y a pas d’avenir sans pardon, Albin Michel, 2000, p.121.

[24] Donald Trump pour ne pas le citer.

[25] Albert Camus, L’homme révolté, Gallimard, 1951, éd. De 1962, p.36.